M. Mesic, cinquante-sept ans, est un président mal à l'aise, qui vit difficilement la situation " absurde " qui lui fait porter deux casquettes aussi peu compatibles que possible. Il est, en effet, président d'une Fédération que lui-même estime déjà morte et dont la République qu'il représente au sein de la présidence collégiale réclame la dissolution. Le principal ennemi de ce Croate est aujourd'hui une armée fédérale dont il est en principe responsable, mais qui lui échappe totalement et qui, de fait, combat les forces de sa propre République. Pour que cette " absurdité " prenne fin, estime-t-il, " il faut reconnaître la réalité ". C'est ce que, pour sa part, il compte faire le 7 octobre.
Lorsque le moratoire suspendant la déclaration d'indépendance de la Croatie et de la Slovénie expirera, ce jour-là, par le départ de ces deux Républiques, " la Yougoslavie cessera d'exister " et, " à partir du moment où la Croatie réalise son indépendance, il n'y a pas de raison que je reste à la présidence " fédérale. " Ce serait trop ambitieux de ma part, en tant que citoyen croate, de vouloir être président d'un autre Etat ", souligne-t-il...
D'ici là, les problèmes auxquels M. Mesic devra faire face ne manquent pas, à commencer par l'affrontement avec l'armée, qu'il a de nouveau sommée, mercredi, de réintégrer ses casernes, lui donnant un délai de quarante-huit heures pour ce faire. Les militaires n'ont pas attendu que l'ultimatum présidentiel expire pour répondre par la négative (lire l'article de Florence Hartmann). M. Mesic a reçu cette réponse transmise par le chef d'état-major, le général Veljko Kadijevic, jeudi à 2 heures du matin. Le président semble s'être fait peu d'illusions sur la teneur de la réponse, tant l'armée lui apparaît comme un simple " instrument de la politique serbe ", qui n'a qu'un but, selon lui, " faire une Grande Serbie ".
Les militaires, dont le rôle est " d'occuper le territoire croate pour le compte de la Grande Serbie ", ne sont plus sous contrôle fédéral, mais " se plient aux ordres de Milosevic ", le président de la Serbie. On peut qualifier, poursuit le président fédéral, le conflit serbo-croate de " guerre d'invasion " : " Ni Milosevic ni l'armée n'abandonneront leur idée d'envahir la Croatie " sans pressions de l'Europe, estime encore M. Mesic, originaire de Slavonie, région orientale de la Croatie à forte minorité serbe, dont une grande partie est occupée par les autonomistes serbes et l'armée.
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