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Buffon et la longévité des espèces Jean-Marie Robine, INSERM, CRLC/Université de Montpellier, France, robine@valdorel.fnclcc.fr Hans Christian Petersen, Ph.D, Associate Professor, Department of Statistics, University of Southern Denmark, J.B. Winslows Vej 9B, DK-5000 Odense C, Denmark. Bernard Jeune, MD, Head of Ageing Research Center, Institute of Public Health, University of Southern Denmark, J.B. Winslows Vej 9B, DK-5000 Odense C, Denmark, BJeune@health.sdu.dk Les démographes n’apprécient pas Buffon. Ils ont mal compris ses apports. Il est pourtant le premier à distinguer les caractéristiques de l’espèce de celles des populations : « l’homme qui ne meurt point de maladies accidentelles vit partout quatre-vingt dix ou cent ans ». D’une façon plus générale, il établit pour toutes les espèces une relation forte entre la durée de la croissance et la durée de la vie. En 1777, il propose une trajectoire logistique pour l’augmentation de la mortalité avec l’âge. Sur un plan plus technique, il explique longuement comment lui ou Dupré de Saint-Maur ont lissé les données de mortalité publiées en 1749 ; ce qui constitue une vraie contribution à la démographie. Son influence sera considérable au 19ième siècle. Tous ceux qui s’intéressent à la longévité le citent directement ou indirectement. S’il laisse ouverte la question de la longévité des patriarches, il règle en quelques mots les espérances chimériques de rajeunissement ou d’immortalité et ne laisse pas beaucoup de place pour les légendes comme celles des animaux à la longévité fabuleuse. Les seules questions d’importance qu’il n’aura pas su anticiper sont celle de la variabilité des durées de vie normales des adultes et celle de leur allongement sous l’action du progrès. C’est sur ce premier point que Sir Holland attaque Flourens en 1857. Entre temps Quetelet a publié ses travaux sur la distribution des valeurs biométriques et il n’est plus possible de répéter les propositions de Buffon sans les amender. Quant au deuxième point, l’étude de la plasticité de la longévité des espèces, en particulier de l’espèce humaine, aux conditions environnementales, il reste un des défis majeurs de la biologie du 21e siècle. Buffon and the longevity of the different species Demographers do not appreciate the true worth of Buffon. They misunderstand his contribution. Yet, he was the first to distinguish between species and populations characteristics: “When he does not die from an accidental illness, man lives everywhere between 90 or 100 years”. More generally, he stated that for all species there was a strong relationship between the time they take to reach adulthood and their life expectancy. He proposed in 1777 a logistic trajectory for mortality rate increase with age. At a more technical level, he carefully explained how he, or Duprès de Saint-Maur, smoothed out the mortality data that he published in 1749; which constitutes a genuine contribution to actuarial science and demography. His influence is substantial throughout the 19th century. He is directly or indirectly quoted by all works dealing with longevity. Keeping open the question of the longevity of the patriarchs, he brushed aside in a few words fanciful hopes for rejuvenation and immortality and left little room for legends such as those about animals with fantastic longevity. The only significant questions he failed to anticipate are the question of variability in adult life durations and the question of increasing life-span under socio-economic advances. In 1857, Sir Holland confronted Flourens on the first point. At that time Quetelet had published his work on biometric values and it was no longer possible to repeat the theories of Buffon without amendment. As regards the second point, the question of the influence of environmental conditions on longevity, especially on human life expectancy, it remains one of the main research challenges for biologists.