Cycles ovariens et lunaires : une ancienne croyance (presque) confirmée

Serge Cannasse

Auteurs et déclarations

10 mai 2024

Milwaukee, États-Unis – Chez l’espèce humaine, un cycle ovulatoire dure en moyenne 29,3 jours. Il est relativement stable chez une femme donnée à un âge donné. D’où vient cette stabilité et comment sont gérés les écarts éventuels pour revenir à la moyenne ? C’est l’objet d’un travail d’une équipe de recherche internationale associant l’Inserm, le CNRS, l’Université Claude Bernard Lyon et les universités de l’Utah et du Milwaukee (États-Unis), publié dans Science Advances.

L’hypothèse retenue par les auteurs et que leur étude a cherché à vérifier est celle d’une horloge interne synchronisée aux cycles lunaires, sur le modèle de l’horloge circadienne fondée sur l’alternance jour-nuit (lumière-obscurité), impliquée dans de nombreux mécanismes physiologiques. Elle suppose une grande stabilité de la durée des cycles aussi bien chez une femme que chez l’ensemble des femmes. En cas de perturbation (raccourcissement ou allongement du cycle), des facteurs environnementaux pourraient entrer en jeu, notamment les cycles lunaires, d’une durée moyenne proche de celle des cycles menstruels.

Une grande stabilité des cycles

Les auteurs ont examiné deux grandes bases de données sur les cycles menstruels, l’une ayant rassemblé les données de près de 27 000 cycles menstruels à partir de 2 303 Européennes, l’autre ayant collecté les données de près de 4 800 cycles à partir de 721 Nord-Américaines.

Le premier résultat est la confirmation de la grande stabilité des cycles menstruels chez une femme donnée à un âge donné. Cependant, certains cycles s’écartaient de cette moyenne. Ainsi quelques cycles courts compenseraient une série de quelques cycles longs de façon à revenir à la durée moyenne. Cela signifie que la durée d’un cycle dépendrait de celle des cycles qui l’ont précédé. Comme l’explique Claude Gonfrier, un des auteurs de l’étude, cela « plaide en faveur de l’existence d’une horloge interne régulant finement les cycles menstruels, elle-même synchronisée par un événement cyclique environnemental. »

Le second résultat est l’existence d’une corrélation modeste, mais significative, entre le cycle menstruel et le cycle lunaire. Chez les Européennes, le cycle menstruel débute plus souvent avec la lune montante, alors que chez les Américaines, il démarre plus souvent avec la pleine lune. Les auteurs n’avancent aucune explication à cette différence. La corrélation entre les cycles menstruels et lunaires doit être confirmée par d’autres études. Les auteurs suggèrent de s’appuyer sur les applications de smartphones utilisées par des milliers de femmes dans le monde pour suivre leurs cycles.

Tenir compte des rythmes biologiques

Si la corrélation était avérée, une explication possible avancée par les auteurs est évolutionniste. Nos ancêtres aquatiques se sont confrontés au phénomène des marées lorsqu’ils ont commencé à quitter les eaux océaniques. Or, les marées sont calquées sur les cycles lunaires. Nos ancêtres auraient progressivement acquis une horloge interne basée sur les cycles lunaires, conjointement avec celle basée sur l’alternance des jours et des nuits. Cela aurait permis que les cycles menstruels des femmes d’un même groupe soient synchronisés, ce qui peut être un avantage pour la reproduction comme pour la survie du groupe. Des recherches sur la régulation génétique des cycles ovariens devraient pouvoir apporter des éclaircissements.

Quoiqu’il en soit, pour les auteurs, leur travail s’inscrit dans la tendance actuelle de la médecine à tenir compte des rythmes biologiques et à s’orienter vers la personnalisation des soins.

 

Cet article a initialement été publié sur Univadis.fr, membre du réseau Medscape.

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