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Le breton au XX° siècle  : renaissance ou création ? La langue bretonne est généralement présentée comme « la » langue de la Bretagne, alors qu’elle n’est pratiqué que dans la partie occidentale de l’ancienne province. Identifiée comme la survivance dans ces zones reculées du vieux gaulois, langue primitive de la France, elle a symbolisé sous l’Ancien Régime et jusqu’à la déconfiture des Celtomanes en 1814 la continuité entre la Gaule et la France. Après la rupture du bretonisme (GUIOMAR 1987) qui propage la théorie d’une origine totalement insulaire de la langue, la valeur du breton devient tout autre : il est désormais le symbole de la nation bretonne. L’un des principaux inspirateurs de la théorie, l’historien de la Bretagne Arthur de La Borderie, écrit dans son Introduction du cours d’histoire de la Bretagne en 1890 : « Et si, par suite des vicissitudes historiques, cette vénérable langue celto-bretonne n’est plus parlée que dans une partie de la Bretagne, dans l’autre partie même, dans celle d’où elle s’est retirée, ses traces, son influence sont partout ; partout elle est respectée, honorée comme la langue des aïeux... » En dehors de cette charge idéologique, le breton en lui-même a longtemps été jugé peu digne d’intérêt et n’était cultivé que par quelques cénacles. Mais depuis une trentaine d’années il figure au hit-parade des préoccupations régionales. La presse locale accorde aux problèmes de l’enseignement du breton, qui ne touche pourtant que quelques centaines d’enfants, une surface sans commune mesure avec celle qu’elle consacre à ceux des dizaines de milliers d’élèves de l’académie de Rennes. Au cours des années 1970 l’accent était mis sur les causes réelles ou supposées du déclin de la pratique du breton : « trahison des élites », rôle néfaste de l’école de la République, jacobinisme français etc. La décennie suivante, après les élections de 1981, a été marquée par les notions de « réparation historique », de « droit à la différence ». Depuis quelques années, les discours, sinon les crédits, des divers pouvoirs - régional, européen et d’une partie de la classe politique nationale - s’accordent à prôner une réhabilitation, voire une officialisation du breton comme des autres langues qualifiées de minoritaires ou minorées de l’Europe. Le discours dominant - maintenant que la langue a cessé de se transmettre depuis une quarantaine d’années - est qu’il faut sauver « le » breton. Mais sans qu’on ne précise jamais ce que l’on entend par ces mots : sauve-t-on une langue comme on préserverait une espèce en voie de disparition ? Quelle réalité recouvre le mot de « breton » dans ce contexte ? Le sens commun, les militants, mais aussi un grand nombre de chercheurs considèrent la langue bretonne comme un objet naturel. Nul n’ignore, bien entendu, l‘existence de dialectes : qu’on les idéalise ou qu’on les rejette comme des nuisances, ils semblent, en tout état de cause, n’être que les avatars d’un grand tout. Et pourtant les difficultés d'intercompréhension orale entre bretonnants de régions diverses sont bien connues, sinon exagérées, sans parler du fossé qui sépare néo-bretonnants et locuteurs des parlers hérités. Quel breton veut-on donc sauver ? Pour quel usage ? A quel public s’adresse ce « sauvetage » ? Aux descendants des locuteurs traditionnels ? A une élite chargée de porter le flambeau du souvenir ? *** Dans la perspective traditionnelle, l’état de perfection de la langue est situé dans le passé. Au commencement étaient l’unité et la pureté. L’histoire n’est qu’une série de dégradations de l'ordre naturel, due aux invasions étrangères ou du moins à des influences extérieures. Une rencontre s’est produite au moment de la naissance des études celtiques modernes à la fin du XIX° siècle entre le point de vue - idéologique - des bretonistes et celui des linguistes comparatistes. Les premiers, se penchant sur le passé celtique qu’ils peignent de couleurs prestigieuses, interrogent l’histoire pour trouver les causes de la dégradation : invasions germaniques puis normandes, rattachement de la Bretagne au royaume de France, conséquences catastrophiques de la révolution française. Les seconds acceptent comme un postulat l’existence d’un état unitaire ancien de la langue, sans dialectes, et cherchent à décrire et expliquer des évolutions qui vont dans le sens de la différentiation. La plupart des travaux portant sur l’histoire de la langue bretonne découlent de cet a priori. Ainsi, le grand celtisant Kenneth Jackson écrit-il en 1967 : « ...The language of the texts belonging to the later MB. stage in the 15th and 16th centuries represents in very broad outline a point in the development of Breton not very much evolved from the hypothetical one prior to the clear differenciation of the dialects C’est nous qui soulignons, ici et dans les citations suivantes.... » (JACKSON 1967, p. 33) « The writer of the present book (...) believes that our Middle Breton texts represent, very broadly speaking, a stage in the history of the language not very far evolved from that from which all the modern dialects are descended, i.e. from the common pre-dialect Breton which is envisaged here as still existing in almost all essentials at the beginning of the Early Middle Breton period... » (ibid. p. 6) On ne saurait être plus clair. Ces prémisses d’un ouvrage qui représente une somme impressionnante de réflexions positives ont des allures d’articles de foi : qu’il soit permis de le noter, sans porter le moins du monde atteinte à la mémoire du maître. Léon Fleuriot, dans sa contribution à un ouvrage collectif (BREKILIEN 1982), affirme : « Vers la fin de la période du moyen breton vers 1600, les facteurs qui maintenaient une certaine unité de la langue s’affaiblissent (...). Alors que jusque-là seul (sic) les grands dialectes du sud-est, origine du vannetais et du nord-ouest, origine du K.L.T., commençaient à s’individualiser depuis le XII° siècle, à partir du XVI° des divergences commencent à apparaître dans le groupe dit K.L.T.. » (p. 269) Parmi ces facteurs, les faits historiques semblent pour cet auteur être dominants : « Mais en Basse-Bretagne, ce n’est pas avant le XVI° siècle et l’union à la France que les positions du breton furent sérieusement menacées. » (p. 260) Pour lui, la métrique du moyen breton ne saurait être qu’une « conservation » qui «  ne peut s’expliquer sans une tradition littéraire ininterrompue depuis le V° siècle et l’enseignement des règles de la poésie dans des écoles bardiques. » (p. 273) Il parle aussi des « traces prestigieuses, mais dans d’autres langues » de la « littérature perdue ». Seul, donc, un retour vers le passé, même conjectural, permettrait de retrouver la richesse des origines. *** Dans sa thèse sur L’Histoire de la langue bretonne d’après la géographie linguistique soutenue en 1951 et remaniée par la suite (1963 et 1981), François Falc’hun, analysant l’Atlas Linguistique de la Basse-Bretagne de Pierre Le Roux, aboutit à des conclusions opposées. Selon ses conclusions, la langue était dès l’origine partagée en deux - ce qu’il nomme « la dualité dialectale primitive, due à la différence entre le parler des Ossismes et celui des Vénètes » (FALC’HUN 1981, p. 547). Aurait succédé une période d’unification sous l’égide de Carhaix, suivie d’une autre période de suprématie des villes côtières. La majeure partie des arguments avancés provient de l’étude des cartes de l’atlas, dont les données ont été recueillies aux alentours de la Première Guerre mondiale. Selon Falc’hun, les dialectes reflètent dans leur diversité l’histoire de la langue, faite de convergences et de divergences successives selon les vicissitudes de l’histoire. L’unité ne se trouve pas à l’origine, elle ne représente qu’une potentialité. On imagine aisément à quel point ces conclusions ont pu être jugées blasphématoires par les autres celtisants. Il suffit de lire les attaques de Jackson invalidant une approche de phénomènes situés dans la longue durée sur la base de faits recueillis à l’époque contemporaine. Bien que Falc’hun ait toujours affirmé que la géographie linguistique ne pouvait permettre qu’une datation relative, Jackson lui fait un mauvais procès : « Linguistic geography » (...) can tell us nothing at all directly about the actual dates when these changes arose. » (ibid. p.6) : Bien plus, il lui reproche d’étudier les mouvements pluridirectionnels des isoglosses au cours de l’histoire sans « a previously established and generally agreed framework of linguistic history and philology... » (ibid. p. 7). Or on sait que Falc’hun, bien au contraire, s’appuyait sur tous les faits chronologiques que la science mettait à sa disposition, qu’il s’agisse de linguistique, d’archéologie, ou - et par là il innovait en faisant de la sociolinguistique avant la lettre - d’économie. *** L’enseignement de notre maître Le « nous » se réfère à Yves Le Berre et à moi-même qui réfléchissons ensemble à ces problèmes depuis de nombreuses années (voir bibliographie). nous a persuadés de l’importance des faits sociaux dans l’évolution des langues. Il nous a également conduits à rejeter l’approche positiviste qui se borne à accumuler de nouveaux faits et à les interpréter à partir de postulats universellement admis par les grands ancêtres. Ainsi Jackson rejette-t-il l’idée d’une possible continuité entre gaulois armoricain et breton en arguant du consensus entre spécialistes : « a view which is of course contrary to the consensus of Celtic scholars since the modern study of the Celtic languages began. » (ibid. p. 31) Nous n’avons pas été tentés de poursuivre la réflexion de Falc’hun dans le sens de l’interprétation des origines. Il est fort probable que le breton est une forme moderne du gaulois. Fleuriot lui-même, si critique au début, l’a admis après lui en s’appuyant, il est vrai, sur des arguments d’un autre ordre. L’idée est vraisemblable et sympathique - se non e vero...- mais nous semble conduire à une aporie.. Ce que nous avons souhaité comprendre, c’est ce que recouvraient des notions apparemment bien établies et constamment utilisées comme celles de « dialecte » et de « langue », qui rassemblent pourtant tant de réalités diverses, mêlant l’écrit et l’oral, le spontané et l’institutionnel. Comment peut-on regrouper sous une même étiquette le breton que nous ont transmis nos parents, celui de Feiz ha Breiz , de Dihunamb ou celui de Gwalarn ? Notre première hypothèse est que tout sujet parlant possède au moins deux registres, l’un familier, quotidien que nous qualifions de paritaire, l’autre formel que nous appelons disparitaire. La diglossie, loin d’être une situation restreinte à des cas particuliers, est le mode ordinaire d’existence d’une conscience linguistique. Pour nombre de bretonnants âgés, le breton est le registre paritaire, celui de l’intimité, par opposition au français de l’école, disparitaire, véhicule des échanges formels. Les dialectes italiens ou allemands semblent entretenir ce même type de relation avec la langue officielle. De nos jours, depuis l’abandon de la transmission des parlers vernaculaires, les Français de France, dans leur grande majorité, n’ont plus à leur disposition que la seule et unique langue française. Ils peuvent pourtant, au sein de la même grammaire, faire usage de deux registres complémentaires, le français paritaire et le français disparitaire. Ainsi, au disparitaire Où vas-tu ? correspondent des tournures populaires vieillies et marquées régionalement, comme les Où que tu vas ?, Où c’est que tu vas ? de l’ouest de la France, tandis que les jeunes générations, de quelque région qu’elles viennent, préfèrent une forme commune de nouveau français paritaire Tu vas où ? A l’intérieur de chaque registre on peut trouver des niveaux - plus ou moins familier, plus ou moins recherché - mais nous rejetons la notion de continuum qui relierait le paritaire au disparitaire du plus familier au plus formel : on est toujours dans l’un ou l’autre des registres. Les mêler dans un même discours est possible, mais il s’agit alors d’un problème de style. Notre deuxième hypothèse est que la langue n’est pas un fait social parmi d’autres. Sans société, pas de langue, sans langue, pas de société. Les deux phénomènes se contiennent mutuellement et interagissent solidairement. Ce qui de notre point de vue forme la société, c’est l’enchevêtrement et la hiérarchie des institutions. Dans cette perspective, nous définissons l’institution comme une fonction stabilisée dans l’ordre du social, dotée de règles communes en vue d’une utilité particulière. Ce qui de notre point de vue forme la langue, c’est l’enchevêtrement et la hiérarchie des idiomes. Nous définissons dans ce cadre l’idiome comme une parole stabilisée dans l’ordre de la langue, dotée de règles communes en vue d’une utilité particulière. Pas d’institution sans idiome correspondant, pas d’idiome sans institution correspondante. Il n’existe pas d’institutions ou d’idiomes naturels qui s’opposeraient à d’autres institutions ou idiomes artificiels. Les idiomes tout comme les institutions n’ont d’existence que sociale. Tout, dans ce domaine, est historiquement constitué, depuis le plus humble parler local jusqu’aux langues d’Etat. Tout idiome, quel qu’il soit et à quelque niveau qu’il se situe, fonctionne comme un système que nous proposons d’appeler sa grammaire. Un idiome n’existe que dans la mesure où il correspond à une institution. Si l’institution vient à disparaître, l’idiome disparaît également, après avoir perduré un temps plus ou moins long, par rémanence. Il faut parfois très longtemps pour que le souvenir d’anciennes institutions ou d’anciens idiomes s’efface. En témoignent les nombreuses expressions dites idiomatiques qui survivent dans les langues et la pérennité de coutumes dont on a oublié le sens depuis des siècles : le paysan du Morbihan continue à décorer son puits de branches feuillues au premier mai sans s’interroger sur la finalité de ce geste. L’espace institutionnel le plus restreint, que nous appelons institution d’usage est le marché local, régi par la seule tradition orale. Quand un bretonnant s’adresse à quelqu’un d’une autre localité, même peu distante de chez lui, il ne manque pas de relever chez son interlocuteur des différences subtiles de langage. « Nous autres, à Sainte-Brigitte, on dit ya (pour ‘oui’), mais à Silfiac ils disent ye. ». C’est ainsi, et cela a toujours été ainsi. Comme il n’existe pas de mot français pour désigner cet idiome : - dialecte est trop polysémique - nous l’avons baptisé badume, mot forgé sur le breton [badym] (du-man, e-barz du-man, ‘chez moi’) que les locuteurs emploient dans ce type de jugement évaluatif sur la base de la simple comparaison des usages : « chez nous autres on dit... ». A un degré plus évolué, au sein d’un espace plus large, on trouve les institutions coutumières. Elles sont régies par une jurisprudence qui peut - mais ce n’est pas indispensable - être inscrite, comme la Très ancienne coutume de Bretagne. Ce que certains appellent avec mépris le brezoneg beleg ‘breton de curé’ est un exemple d’idiome correspondant à ce type d’institution. Nous l’appelons standard, car encore une fois le terme de dialecte n’est pas assez précis. Deux standards bretons émergent au XVII° siècle, sur la base de l’ancienne koinè que la tradition nomme moyen breton, élaborée au milieu du XIV° siècle par les frères mendiants, Carmes et Franciscains, autour de la baie de Morlaix, à l’époque la région économiquement la plus développée. Ces standards se forment au sein des collèges de Quimper et de Vannes, fondés par les jésuites (respectivement en 1620 et en 1630). Vecteurs de la Contre-Réforme, souvent non bretonnants, ils avaient besoin d’un moyen de communication relativement uniforme leur permettant d’être entendus sur un espace plus large que les badumes. Les standards, même si leur usage oral est important, par exemple dans les sermons, ne se fondent que sur l’écrit. Nul ne les emploie en dehors de l’usage spécifique auquel ils sont destinés : on peut penser raisonnablement que les jésuites communiquaient entre eux en français et en latin, comme les prêtres ont continué à le faire jusqu’au moment où ils ont abandonné le breton au XX° siècle. Les standards ne représentent aucun parler particulier, bien qu’ils prennent en compte naturellement les principales caractéristiques des badumes usités sur leur territoire d’exercice. Ce n’est pas un hasard si le standard vannetais qui émerge à cette époque a des caractères fort distincts du standard quimpérois. En 1790, le pouvoir révolutionnaire crée de nouveaux évêchés dont les limites coïncident avec celles des départements. De nouveaux standards vont se partager ces nouvelles divisions administratives. Le Finistère et le Morbihan conservent peu ou prou les standards prérévolutionnaires, tandis qu’un nouveau standard naît dans les Côtes-du-Nord, dans lequel seront publiés les catéchismes et recueils de cantiques. Premier périodique catholique en breton, Les Annales de la Société de la Propagation de la Foi paraîtront dans chacun de ces standards dès leur naissance : Lihereu Brediah er Fé (1843) pour le Morbihan, Lizeriou Breuriez ar Feiz (1844) pour le Finistère, Lizero Breuriez ar Fe (1865) pour les Côtes-du-Nord. Grâce aux progrès de l'alphabétisme résultant de la mise en application des lois scolaires de Jules Ferry, une presse hebdomadaire entièrement de langue bretonne ou bilingue se développe dans le Finistère, dont le standard se caractérise de plus en plus par un moindre recours aux emprunts au français mais aussi par le rejet des néologismes excessifs des bretonistes. Le même processus s'est déroulé à partir du début du XX° siècle dans le Morbihan et, dans une moindre mesure dans les Côtes-du-Nord, où l’influence de l’Eglise était moins grande. Ces standards font l’objet de discours évaluatifs, surtout par la comparaison avec les badumes : « Nous disons ainsi, mais les prêtres disent autrement ». Et il est certain que la parole du prêtre a plus de poids que celle du paysan. L’institution la plus englobante est l’institution de droit, qui se développe dans le cadre d’un Etat national. Nous appelons norme l’idiome correspondant. La norme s’appuie entièrement sur le droit écrit et fonctionne selon des règles fixes. Elle fait l’objet de discours renvoyant à des normes évaluatives et fictives, mais aussi à la rédaction de normes prescriptives, applicables à tous sans distinction ce qui, notons-le, n’était pas du tout le cas pour les badumes et les standards. La France nous semble être le pays qui a mené le plus loin cette normalisation. La Révolution a créé le système métrique, a réformé le calendrier et a même tenté de normaliser la mesure du temps... Le statut de citoyen fait coïncider l’institution nationale et l’usage du français, idiome de la nation. Ce qui était la langue du Roi est devenu le français national. Tous les autres parlers - qu’il s’agisse d’anciens dialectes (bourguignon, picard), de langues allogènes (allemand, italien) ou indigènes (provençal, breton) - se sont trouvés placés ipso facto en situation patoisante. Après deux cents ans, on constate que l’usage de la langue française s’est répandu dans tout le pays. Même si les Français aime à jouer avec la langue - les jeux de mots, les calembours sont un sport national - le caractère prescriptif de la norme a été intériorisé par l’ensemble de la population. Il n’est pas rare que des gens se demandent si tel mot est « dans le dictionnaire », c’est-à-dire s’il est « français ». Le succès de jeux comme la « dictée » de Pivot est sans doute unique, et il y a eu une levée de boucliers lorsqu’une réforme de l’orthographe a été proposée il y a quelques années. *** Le but que poursuivait Le Gonidec en rédigeant ses dictionnaires d’un breton « purifié » n’était nullement de créer une norme, mais, en mettant au point une orthographe « philosophique », il entendait fournir une contribution aux études savantes des celtomanes qu’il fréquentait au sein de l’Académie celtique. Son disciple Hersart de La Villemarqué n’avait pas non plus cette ambition, bien qu’il ait poussé encore plus loin que son maître la « purification » du breton en faisant la chasse aux mots français, en créant des néologismes et en empruntant des mots gallois. Son but est politique : le breton est un rempart contre les idées révolutionnaires. Parlant des « hommes éclairés » dont il fait partie, il affirme que « S’ils ravivent, s’ils épurent, s’ils perfectionnent le breton, c’est pour le rendre plus propre à instruire le peuple (...) leur but est de répandre l’instruction dans la foule, par tous les moyens possibles, mais surtout par la presse ; d’entretenir les traditions d’honneur et de loyauté des ancêtres ; de développer les bons instincts des classes laborieuses(...) Ils se servent de la langue bretonne comme du seul instrument à leur portée, car le peuple n’en comprend pas d’autre ; et tant qu’ils n’en auront pas un plus adapté aux besoins populaires, ils croiront devoir l’employer. (« Essai sur l’histoire de la langue bretonne », préface au Dictionnaire français-breton de Le Gonidec, 1847, p. Ixv). Ce n'est qu'avec le développement du nationalisme au XX° siècle que va être tentée une normalisation du breton, sur la base des principes élaborés au siècle précédent. Le véritable fondateur de cette entreprise est sans conteste François Vallée (1860-1949), rentier de son état, qui, bien qu’originaire de Belle-Ile-en-Terre (Côtes-du-Nord), n’était pas de langue maternelle bretonne. Enflammé comme bien d’autres dans son enfance par la lecture du Barzaz-Breiz, il étudie les langues celtiques à Rennes, s’installe à Saint-Brieuc et décide de se vouer corps et âme à la langue bretonne. C’est à son initiative que se réunit en 1908 le Comité d’entente entre les écrivains bretons qui va jeter les bases d’une orthographe unifiée destinée à une partie seulement de la Basse-Bretagne, le K.L.T. (territoire d’extension du standard quimpérois, du nom breton de trois des évêchés de l’Ancien Régime, Kerne ‘Cornouaille’, Leon et Treger ‘Tréguier’). Il est rejoint dans son apostolat par René Leroux, alias Meven Mordiern (1878-1949), rentier lui aussi et sans aucune attache bretonne. Il avait découvert les Celtes en suivant des cours à l’Ecole des Hautes Etudes à Paris. Il décida de venir s’installer en Bretagne, terre celtique, et de consacrer toutes ses forces à la création d’une langue bretonne moderne. Pendant trente cinq années les deux hommes collaborèrent pour la confection d’ouvrages savants destinés à mettre au point une langue unifiée et purifiée. Il est symptomatique que bien qu’ayant tous les deux vécu en Haute-Bretagne, mais tout près du pays bretonnant, Ils n’aient guère cherché à avoir de contact avec les milieux bretonnants traditionnels. Leur principe est de fabriquer une langue susceptible de « tout exprimer en breton ». Il faut s’éloigner le plus possible du français, puiser dans les trésors de la langue populaire et créer de nouveaux mots. L’influence de l’espéranto est très nette. L’introduction de Vallée à son Grand dictionnaire français breton (1931) fait penser à cette langue artificielle dans laquelle on fabrique des nouveaux mots selon des recettes très simples comme l’adjonction de préfixes et de suffixes. Ce procédé ne peut évidemment choquer que les seuls bretonnants : les néo-bretonnants, pour qui la langue n’a pas de connotations paritaires, est un instrument artificiel qu’on modèle à sa guise. Un troisième personnage, Louis Nemo (1900-1978), est plus connu sous son pseudonyme de Roparz Hémon. Né à Brest, il est francophone de naissance et enseigne l'anglais dans le lycée de sa ville natale où il a fait ses études. Célibataire comme nos deux précédents compères, il va s’appliquer, à l’aide de l’outil forgé par eux, à former une littérature bretonne moderne. En 1925 il crée la revue littéraire Gwalarn, qui publie des textes inédits et surtout de nombreuses traductions dans le but de doter d’une norme la future « élite » dirigeante du futur Etat breton. Il rejette pratiquement toute la littérature en breton des siècles passés comme indigne d’un Etat moderne et il affiche sans cesse un certain mépris pour «ar werin » ‘le peuple’, qui parle un « trefoedach » ‘patois’. Par la sévérité de ses compte rendus, il exerça une véritable dictature intellectuelle sur ses collaborateurs. Ce qu’il prône, c’est une langue entièrement nouvelle : « Yez nevez-flamm Breiz-Izel, eeun ha glan, kentoc’h eget yezou koz ar bed e c’hellez ober labour ar wirionez ». (Eur Breizad oc’h adkavout Breiz, Brest, 1931, p. 54) ‘Langue flambant neuve de la Basse-Bretagne, simple et pure, tu peux faire oeuvre de vérité plutôt que les anciennes langues du monde’. Dans le vannetais on développait aussi une langue littéraire, répandue par Loeiz Herrieu, le « barde-laboureur », qui dirigea la revue Dihunamb de 1904 à 1944. La fusion des deux systèmes n’était pas vraiment à l’ordre du jour. Il fallut les circonstances de la guerre pour que se produise l'absorption du standard vannetais dans la norme générale du breton. Roparz Hémon était chargé depuis le premier juillet 1941 des émissions en breton à Radio-Rennes créées grâce au soutien discret - il fallait ménager les autorités vichyssoises - des autorités allemandes. Le celtisant Leo Weisgerber, membre de la Deutsche Gesellschaft für Keltische Studien (fondée en 1936), était chargé de superviser ces émissions radiophoniques. Il semble que ce soit sur ses conseils que Roparz Hémon convoqua un certain nombre d’écrivains à une réunion le 8 juillet 1941 : elle devait aboutir à la mise au point d’une orthographe unitaire qui s’appellerait « peurunvan » ‘superunifiée’. Il ne s’agissait pas d’une simple réforme de la graphie destinée aux manuels scolaires, mais bien de la création d’une norme intangible : « Diwar ur boultrenn a rannyezhoù e voe graet ur yezh, endro d’ar stern dir aozet gant Ar Gonideg ha Vallee. Ur yezh lennegel da gentan, eus 1925 betek 1941. Adalek 1941, ur yezh Stad. An devezh brasan en istor ar brezhoneg a zo (sic) bet an 8 a viz Gouere 1941. (...) Un emglev a dalvoudegezh vroadel e voe emglev an 8 a viz Gouere : ar gor e kof hor yezh troc’het-krenn. » (1925-1950-1975 in Al Liamm 20, 1950). « D’une poussière de dialectes on fit une langue, autour du cadre d’acier établi par Le Gonidec et Vallée. Une langue littéraire d’abord, de 1925 à 1941. A partir de 1941, une langue d’Etat. Le 8 juillet 1941 a été le plus grand jour de l’histoire du breton (...).L’entente du 8 juillet 1941 a été une entente de valeur nationale : l’ablation brutale de l’abcès dans le ventre de notre langue ». A la région, pensée comme futur Etat par les séparatistes bretons, devait correspondre une norme. Au moment de la Libération, la régionalisation administrative mise en place par Vichy est abolie. Les propositions de loi en faveur de la langue bretonne qui se multiplient vont longtemps avoir pour principal argument le respect de la personnalité des petits bretonnants et non la sauvegarde de la langue. Il s’agit bien de la défense, non des badumes, mais de ceux qui les parlent. Suite à ces revendications la loi Deixonne, portant sur l’enseignement des langues et cultures régionales, est adoptée en 1951. En conséquence, une commission se réunit en Bretagne pour mettre sur pied l'orthographe universitaire de la langue bretonne en s’appuyant sur les principes élaborés par François Falc’hun (FALC’HUN 1956). Ce système proposait des principes orthographiques uniques adaptables aux divers badumes des enfants. François Falc’hun espérait qu’une pratique de plus en plus étendue de la lecture et de l’écriture par les enfants aboutirait de proche en proche à une unification naturelle de la langue : c’est exactement ce que les sociolinguistiques corses proposent aujourd’hui sous le nom de langue polynomique (MARCELLESI 1990). Des concours scolaires furent organisés dans les années suivantes aussi bien dans le privé que dans le public, et ils connurent un grand succès. Il s’agissait pour les enfants de rédiger un texte sur un sujet rural comme « La vache perdue » ou « l’incendie ». Mais ce bel élan fut bien vite coupé par l’abandon brutal de la transmission de la langue aux enfants. Cependant, les tenants de la norme superunifiée, devenue l'emblème du mouvement nationaliste breton, rejettent avec véhémence la régression que constitue selon eux la nouvelle politique linguistique. Dans les années 1970, quand les discours « ethniques » se sont popularisés, une forte demande d’enseignement du breton s’est exprimée. Des réunions destinées à aboutir à une unification de l’orthographe se sont tenues pendant des années pour déboucher sur la création d’une nouvelle graphie dite « etrerannyezhel » ‘interdialectale’, adoptée initialement par l’Union Démocratique Bretonne (U.D.B.). Il ne s’agissait pas là seulement de graphie, mais en fait de la constitution d’une norme en quelque sorte polynomique, portant non plus sur le principe du plus petit commun dénominateur dans le système synchronique, comme l’universitaire, mais sur l’entassement étymologique. Ainsi les trois mots écrits en universitaire miz ‘mois’, koz ou koh ‘vieux’ (selon le badume), et plas ‘place’ sont-ils notés en interdialectal mis (gallois mis), kozh (accumulation des deux réalisations locales) et plass (français ‘place’). *** Le système centraliste ne s’est pas ressenti du projet gaullien d'édification d’une union européenne respectueuse de la souveraineté des Etats nationaux. Mais, à partir des années 1970, le changement de politique qui a mené au renforcement progressif du pouvoir supranational et corollairement à celui des régions face au pouvoir central a provoqué une rupture fondamentale avec cette tradition jacobine. Les autonomistes bretons ont été depuis leurs débuts favorables à un pouvoir fédéral européen, qui occulterait le pouvoir central de la République. « Depuis ses origines, le mouvement breton moderne a été en faveur d’une organisation fédérale de l’Europe... et de longues études ont établi la doctrine bretonne en matière d’unité européenne : les entités réelles, vivantes, que sont les nations, doivent toutes, grandes ou petites, être dotées des mêmes prérogatives, pouvoirs et compétences politiques et, pour les questions d’intérêt général, se fédérer dans le cadre européen ». Per Denez, Ar Vro 14, juin 1962. Les mouvements particularistes se sont reconvertis au sein des nouvelles institutions régionales. La Charte culturelle octroyée par le président Giscard d’Estaing en 1978 a été suivie de la création d’un Institut Culturel de Bretagne, organe associatif étroitement lié au Conseil régional et subventionné par lui. La ressemblance avec l’Institut Celtique créé sous la direction de Roparz Hémon en octobre 1941 n’est certainement pas un effet du hasard. La nouvelle institution régionale est naturellement soucieuse de la promotion de ses caractères originaux, surtout culturels. La langue bretonne en est toujours l’un des signes les plus remarquables, et c’est son caractère emblématique qui amène les élus à appuyer des actions comme l’introduction de panneaux routiers bilingues, qui apportent une note d’étrangeté dans un paysage au demeurant de moins en moins original. Le soutien financier aux écoles bilingues Diwan est de même une action obligée pour les élus dont aucun, tous partis confondus, ne veut courir le risque de passer pour un adversaire de la langue bretonne. On subventionne donc sans discrimination des ouvrages illustrant la modernité de la langue bretonne, sa capacité à « tout dire ». C’est le projet de Vallée et, bien sûr, de Roparz Hémon qui semble se réaliser, mais il ne s’agit que de faux-semblants. Quel analyste aura besoin de consulter le Geriadur ar bredelfennerezh - Dictionnaire de psychanalyse quadrilingue (Preder, 1983) ? A quelle fin autre que symbolique pourra servir le Geriadur an Armerzh, ar C’henwerzh hag an arc’hant - Dictionnaire de l’économie politique, du commerce et des finances (Preder, 1995), farci de néologismes comme « pellstlennegezh » ‘téléinformatique’ ? Dans l’introduction au Geriadur Ollvrezhoneg, Dictionnaire unilingue breton (An Here, 1995), Pêr Denez, Président d’honneur du Conseil Culturel de Bretagne et militant bien connu, rappelant que le dictionnaire de Grégoire avait été publié par les soins des « Etats de Bretagne » (Breudoù Breizh), constate : « Ur mare nevez zo breman o tigerin evit hor yezh en darempredoù gant tud zo, hag aozadurioù zo, e karg. Un dra a-bouez eo, hag un dra vat ». ‘Une nouvelle ère s’ouvre maintenant pour notre langue dans ses rapports avec des personnes et des organismes responsables. C’est une chose importante, et une chose indispensable ». Il s’agit bien, en principe, de la prise en charge d’une norme par un pouvoir. Et c’est tout à fait logiquement - selon notre définition de la norme - que ce dictionnaire ne donne ‘qu’une prononciation par entrée’ (« un distagadur hepken evit pep penger »). Mais tout reste sur le plan symbolique. L’aide matérielle à l’enseignement du breton n’est accordée que dans une perspective élitiste. Alors que 22% des parents du Finistère Enquête de l’Inspection d’Académie du Finistère, 1995. souhaiteraient moins d’une heure par semaine de breton à l’école, que 50% demandent que les programmes nationaux soient illustrés par des exemples régionaux, que 20% sont indifférents, 5% seulement souhaitent la création de classes bilingues. Or, ce sont surtout ces derniers qui sont écoutés. Il ne s’agit pas en réalité de redonner vie à une langue moribonde, ni même d’encourager les enfants à apprendre le breton. La grande masse ignore tout de la langue, tandis qu’on crée une « élite » chargée de porter le flambeau. L’action est spectaculaire, et, somme toute, peu coûteuse. Une nouvelle maison d’édition confortablement subventionnée par la région a officialisé dans les faits la graphie de 1941 et la pseudo-norme qu’elle sous-tend, symbole de la montée en force d'une institution nouvelle. *** Où donc en est la langue bretonne aujourd’hui ? L’usage des badumes, qui ont encore une place rémanente assez importante dans la société, s’éteint au rythme des décès des personnes qui en ont hérité dans leur enfance. Leurs plus jeunes locuteurs ont au mieux une cinquantaine d’années. La civilisation rurale dont ils étaient le véhicule a disparu, et le temps est bien fini où des jeunes linguistes pouvaient s’initier au breton en travaillant dans une ferme. Les standards ne subsistent plus qu’à l’état de souvenir chez les très anciens, qui ont appris le catéchisme en breton jusque vers les années 1950. La sauvegarde symbolique de la langue bretonne participe de l’effort de construction d'une image spécifique de la région, teele qu’elle est offerte au regard des visiteurs et des Bretons eux-mêmes. Des divisions territoriales naguère presque oubliées - comme le Goelo - sont maintenant ressuscitées. Des liens avec les pays celtiques d’Outre-Manche, hier assimilés à l’Angleterre, pays peu estimé autrefois par la grande masse de la population, se sont noués grâce à des jumelages entre villes et communes rurales. Les conditions historiques indispensables à la naissance d’une norme n’ont jamais existé pour la Bretagne. Ce n’est pas une fatalité, mais un constat. Les événements de la guerre n’ont fait que provoquer la réprobation de la plupart des bretonnants. Le peu de contacts qu’ils ont eus avec le breton normé ne les a pas non plus encouragés à apprendre une langue écrite considérée comme difficile, et très différente de celle qu’ils parlent encore. On loue les efforts de ceux qui connaissent la langue écrite, mais on ne s’y implique pas soi-même. Les sondages portant sur l’opportunité d’enseigner le breton à l’école fournissent toujours des réponses massivement favorables. Mais peu sont prêts à engager leurs enfants dans cette voie. Dans le fond, un consensus existe entre les plus exigeants des défenseurs de la langue bretonne et la masse de la population et de ses élus pour confier la tâche de mémoire à des spécialistes. Les mouvements particularistes chargent de tous les maux l’école de la République. N’est-ce pas elle que l’on accuse d’avoir « tué » la langue ? C’est pourtant cette école qui va être chargée symboliquement de « sauver » le breton. C’est-à-dire d’enseigner la « norme ». Enquêtant en breton local auprès d’une dame dont la petite-fille apprenait le breton à l’école, j’interrogeai cette dernière sur le breton de sa grand-mère : « Je ne comprends pas bien ce qu’elle dit, me dit-elle, et d’abord, ce n’est pas joli. » Deux directions sont encore envisageables aujourd’hui : soit se limiter à enseigner une nouvelle langue artificielle de façon massive à moins de 1% des enfants, soit initier tous les enfants à la langue de leurs ancêtres dans sa diversité et sa richesse, ou du moins éveiller leur intérêt pour l’héritage de leurs grands-parents. De bons bretonnants sont encore faciles à rencontrer. Mais une telle entreprise démocratique serait moins spectaculaire, et infiniment plus coûteuse, que la concentration symbolique de la tâche de mémoire sur un groupe restreint. 27 septembre 1995 Jean Le Dû Université de Bretagne Occidentale Brest bibliographie Falc’hun, François, sd., L’Orthographe universitaire de la langue bretonne, s.l., Emgleo Breiz, 1956. Falc’hun, François, 1963, Histoire de la langue bretonne d’après la géographie linguistique, Paris, P.U.F. (2° éd.). Falc’hun, François, 1981, Perspectives nouvelles sur l’histoire de la langue bretonne, Paris, U.G.E. Fleuriot, Léon, 1980, Les origines de la Bretagne, Paris, Payot, 1980. Fleuriot, Léon, 1982, « Les langues de Bretagne, aperçu sur l’histoire du breton » in Brekilien, Yann (éd.), La Bretagne, Paris, Les Editions d’organisation, pp. 245-324. Guiomar, Jean-Yves, Le Bretonisme : les historiens bretons au XIX° siècle, Rennes, 1987. Jackson, Kenneth, 1967, A Historical Phonology of Breton, Dublin, DIAS. Le Dû, Jean, 1990, « Langue nationale unique ou retour de la différence ? Analyse des projets de lois pour l'enseignement des langues de France sous la 4° et la 5° Républiques » in. Wiss. Zeitschrift Karl-Marx-Un. 4, pp. 380-387. Le Dû, Jean, Le Berre, Yves, 1987, « Contacts de Langues en Bretagne » in Travaux du Cercle Linguistique de Nice 9, pp. 11-33. 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