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Économie

Comment les douanes se préparent au Brexit, une nouvelle fois reporté

Alors que le Brexit vient d’être à nouveau reporté au mieux en janvier 2020, les services des douanes affirment être prêts à faire fonctionner leur nouvelle "frontière intelligente" entre l’Hexagone et le Royaume-Uni.

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Les douanes ont mis en place un nouveau système informatique pour contrôler les camions qui traversent la Manche.

Pascal Rossignol

Ils sont 600 douaniers déjà sur le pied de guerre, attendant d’être affectés dans les ports de l’Ouest et du Nord, à la sortie du Tunnel sous la Manche, dans les aéroports et à la gare du Nord. Mais ils vont devoir patienter encore un peu avant de prendre leurs fonctions. Le Brexit n’aura, en effet, pas lieu le 31 octobre, comme le souhaitait le premier ministre Boris Johnson. Il faudra désormais en passer par la tenue de nouvelles élections législatives, prévues le 12 décembre. Seul mérite de ces reports à répétition: ils laissent le temps à la direction des douanes française, aidée par le cabinet Capgemini, de se préparer à l’échéance fatidique.

Un dernier test grandeur nature a ainsi été effectué le 17 octobre dernier. Des dizaines de camions, amenés par un navire de la Brittany Ferries en provenance de Portsmouth, ont pu s’engouffrer sur les quais de Saint-Malo et franchir sans encombre la "frontière intelligente". "Il y a encore quelques améliorations à apporter en termes de signalisation mais cela fonctionne très bien sur le plan technique", se félicite Jean-Michel Thillier, directeur adjoint des douanes. Ce nouveau dispositif doit permettre de rétablir les contrôles entre la France et le Royaume-Uni, sans trop ralentir les cinq millions de camions qui traversent la Manche et la mer du Nord chaque année.

Une "frontière intelligente"

Les douanes ont ainsi développé un système d’information, baptisé SI Brexit, qui sert d’interface avec les logiciels des compagnies maritimes. Les entreprises doivent remplir une prédéclaration afin d’obtenir un code-barre, relié à la plaque d’immatriculation du camion. En scannant la plaque avant la traversée maritime (à l’import), les douaniers reçoivent les informations sur les marchandises et ont le temps de lancer une analyse de risques. A leur arrivée, ils peuvent ainsi orienter les véhicules, directement vers l’autoroute pour ceux ne nécessitant pas de contrôles (file verte) ou vers des parkings réservés, en cas de déclarations non valides ou de marchandises devant faire l’objet d’une inspection spécifique (file orange).

Pour faire fonctionner cette "frontière intelligente", 50 millions d’euros ont été investis en informatique, immobilier et personnel. Si les effectifs douaniers restent globalement stables autour de 17.400, 700 agents supplémentaires vont être affectés aux points névralgiques dont 600 sont déjà prêts selon la direction. "Le niveau de formation nous semble encore insuffisant", alerte David-Olivier Caron, de la CFDT, qui est toutefois bien moins offensif qu’en début d’année. Juste avant la première échéance prévue pour le Brexit, le 29 mars, les syndicats avaient, en effet, initié une grève du zèle, déclenchant des embouteillages aux abords du Tunnel et de longues queues pour l'Eurostar.

Ils se plaignaient de l’insuffisance des moyens prévus pour le Brexit, mais en profitaient aussi pour réclamer des sous et protester contre les réformes en cours, notamment le transfert du recouvrement de certaines taxes vers le fisc. Le mouvement n’a pris fin qu’à la mi-mai, après que le gouvernement a accordé une hausse de 65 euros par mois à tous les agents et une revalorisation des heures de nuit. "Depuis, tous les bureaux et les zones de déchargement nécessaires ont été aménagés, note David-Olivier Caron. Mais un tel système de frontière intelligente, inédit et très ambitieux, nécessitera des mois voire des années de rodage."

Des entreprises mal préparées

Son succès dépendra de la capacité des entreprises à remplir correctement leurs prédéclarations afin de ne pas engorger les zones "orange". Le sujet est surtout sensible à l’import vers la France, les autorités britanniques ayant décidé, dans un premier temps, de ne pas contrôler les exports vers le Royaume. Pour sensibiliser les entreprises, les douanes ont tenu de nombreuses réunions en région en lien avec les chambres de commerce. Un site Internet dédié et une hotline ont été mis en place, des guides ont été édités et des flyers distribués aux routiers. Depuis septembre, des rencontres ont aussi été organisées en Allemagne, en Espagne et dans les pays de l’Est pour informer les transporteurs et les exportateurs étrangers.

Malgré ces efforts, la moitié des PME s’estime encore mal préparée au Brexit, selon une enquête récente de Bercy, révélée par le JDD. "Il y a une vraie difficulté pour toucher les entreprises qui n’ont l’habitude d’exporter qu’au sein de l’Union européenne et en petites quantités", reconnait Jean-Michel Thillier, qui reste aussi vigilant sur les modalités d’organisation outre-Manche. "Les compagnies de ferrys et Eurotunnel se sont engagées à ne pas embarquer les camions qui n’avaient pas rempli leurs prédéclarations." Le travail des douanes sera facilité si l’accord signé avec Bruxelles est adopté par la Chambre des communes, comme cela semble en prendre le chemin. Celui-ci prévoit, en effet, une période transitoire d’un ou deux ans durant laquelle le Royaume-Uni resterait dans l’union douanière. De quoi laisser le temps aux entreprises de se préparer à la "frontière intelligente".

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