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Le gouvernement annonce la réquisition des salariés d'Esso: en quoi consiste cette procédure?

Face à un mouvement social qui persiste dans les raffineries et centres de dépôt de carburant, Elisabeth Borne a annoncé la réquisition des personnels d'Esso. BFM Business fait le point sur ce que dit la loi.

Après avoir brandi la menace, le gouvernement passe à l'action. Face à un mouvement social qui perdure, la Première ministre Elisabeth Borne a annoncé ce mardi la réquisition des peronnels pour débloquer les dépôts Esso-Exxonmobil. Il s'agit d'un cas de figure extrême prévu par la loi alors que l'employeur d'une entreprise privée "ne peut en aucun cas s'arroger le pouvoir de réquisitionner des salariés grévistes" d'après un pourvoi en cassation en date du 15 décembre 2009.

A défaut d'être encadrée par le droit du travail, la réquisition des salariés peut être ordonnée par le pouvoir exécutif comme le prévoit l'article L2211-1 du Code de Défense. Le gouvernement peut ainsi s'ouvrir cette possibilité via des décrets pris en conseil des ministres "en cas de menace portant notamment sur une partie du territoire, sur un secteur de la vie nationale ou sur une fraction de la population".

Le préfet départemental peut également agir

A une échelle plus locale, l'autorité administrative titulaire du pouvoir de police, à savoir le préfet départemental, peut aussi être saisie. C'est précisément ce qu'entend faire Elisabeth Borne qui a annoncé leur avoir demandé "d'engager, comme le permet la loi, la procédure de réquisition des personnels indispensables au fonctionnement des dépôts" d'Esso. A ce titre, l'article L2215-1 du Code général des collectivités territoriales indique:

"En cas d’urgence, lorsque l’atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d’entre elles, réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu’à ce que l’atteinte à l’ordre public ait pris fin ou que les conditions de son maintien soient assurées."

Cependant, le préfet ne peut pas instaurer un service complet ou normal et doit se contenter d'un service minimum dans le cadre de cette réquisition afin de ne pas porter atteinte au droit de grève consacré dans l'article 7 du préambule de la Constitution de 1946. Par ailleurs, les mesures prises doivent répondre à l'urgence de la situation et être proportionnelles aux nécessités de l'ordre public. En cas de refus de se soumettre à un ordre de réquisition, le salarié commet un délit puni d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 10.000 euros d'amende.

Par Timothée Talbi