Avner est un homme de 27 ans au visage enfantin, avec des yeux très bleus, des cheveux blonds et des taches de rousseur. Entre 2004 et 2007, il a effectué son service militaire dans l'unité spéciale des parachutistes de l'armée israélienne, entre Naplouse et Jénine, en Cisjordanie.
"Comme sergent, j'ai mené de nombreuses opérations dites "straw widow", qui consistent à prendre une maison palestinienne pour placer des tireurs d'élite ou des observateurs, raconte Avner. J'ai réveillé des familles. On les regroupait dans une pièce. Je me rappelle d'un incident : un soldat pointait son arme sur un père et son fils qui essayaient de lui parler en arabe. Aucun d'entre nous ne comprenait. Le soldat s'est énervé. Le garçon voulait juste aller aux toilettes, et il a eu si peur qu'il s'est uriné dessus. Avant mon service, j'ai travaillé avec des enfants et je me suis dit qu'il aurait pu être l'un d'eux."
L'ancien militaire termine aujourd'hui ses études dans le secteur social. "Avant de faire l'armée, je pensais que les Palestiniens étaient une entité ennemie, je n'avais pas imaginé que je serais confronté à des femmes, des enfants et des personnes âgées, poursuit-il. Tsahal [Forces de défense d'Israël] traite de la même façon un enfant qui jette des pierres et un militant du Hamas."
Avner a décidé à la fin de son service de se tourner vers l'association Breaking the silence ("Rompre le silence"), qui recueille les témoignages d'anciens soldats ayant servi dans les territoires occupés. L'Organisation non gouvernementale (ONG) a rassemblé les récits anonymes d'une trentaine de jeunes Israéliens passés sous les drapeaux entre 2005 et 2011, et confrontés à des violences commises sur des enfants palestiniens.
LES MILITAIRES LEUR FONT PEUR
"Il y a un grand malentendu sur la façon dont l'armée israélienne traite les enfants. De l'extérieur, on imagine qu'ils bénéficient d'un traitement spécial, or ce n'est pas le cas, justifie Yehuda Shaul, fondateur de l'ONG. Nous sommes loin de la violence palestinienne des années d'Intifada, mais l'armée se comporte comme à cette époque-là : pour contrôler les Palestiniens contre leur volonté, les militaires leur font peur, et c'est devenu une routine."
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