Digithéque, Jean-Pierre Maury

Comores


Constitution du 1er octobre 1978

Préambule.
Titre premier. Dispositions générales.
Titre II. Des institutions des îles.
Titre III. Des institutions fédérales.
Titre IV. De la justice.
Titre V. De la suspension et de la révision de la Constitution.
Titre VI. Dispositions transitoires.
    A la suite d'un référendum d'autodétermination, tenu le 22 décembre 1974, les dissensions au sein de la majorité parlementaire française provoquent un imbroglio qui se traduit par le maintien de la présence française à Mayotte et par une déclaration unilatérale d'indépendance des Comores,  le 6 juillet 1975. En outre, quelques jours plus tard, le 3 août, le président Ahmed Abdallah est renversé par un coup de force, appuyé par des mercenaires. Le nouvel homme fort, Ali Soilih, établit un régime révolutionnaire, et une Constitution est adoptée le 23 avril 1977.
    Le 13 mai 1978, un nouveau coup de force, toujours appuyé par des mercenaires (Bob Denard), au cours duquel Ali Soilih est assassiné, ramène au pouvoir l'ancien président Ahmed Abdallah. Un référendum permet l'adoption de la deuxième Constitution, qui régit le pays jusqu'à l'assassinat du président Abdallah, le 26 novembre 1989. Celui-ci, qui  avait fait adopter, le 5 novembre 1989, une nouvelle révision de la Constitution, afin notamment de supprimer la limitation à deux mandats, fut assassiné avant de l'avoir promulguée. La révision fut alors oubliée et la Constitution appliquée jusqu'à la destitution du président Djohar, le 3 août 1991.
    A la suite des troubles qui s'ensuivirent, une troisième Constitution est adoptée, le 7 juin 1992.

Source : Brochure communiquée par notre collègue Alban Maba, à la suite d'une mission aux Comores.


Préambule.

Le peuple comorien proclame solennellement sa volonté de puiser dans l'Islam, religion d'État, l'inspiration permanente des principes et des règles qui régissent l'État et ses institutions.
Il affirme son attachement aux principes définis par la Charte des Nations unies et par celle de l'Organisation de l'unité africaine.
S'inspirant de la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies, il proclame et garantit :
- l'égalité de tous les citoyens en droits et en devoirs sans distinction de sexe, d'origine, de race, de religion ou de croyance ;
- la liberté et la sécurité de chaque individu sous la seule condition qu'il n'accomplisse aucun acte de nature à nuire à autrui ;
- la liberté de circulation et de résidence sous réserve des prescriptions législatives ;
- les libertés d'expression et de réunion, la liberté d'association et la liberté syndicale dans le respect des lois de la République ;
- le droit de tout enfant à l'éducation et à l'instruction par ses parents et les maîtres choisis par eux ;
- le droit de la jeunesse à être protégée par l'État et les collectivités contre l'abandon moral et contre toute forme d'exploitation ;
- les libertés de pensée, de conscience et de pratique de la religion sous les seules réserves du respect de la morale et de l'ordre public ;
- l'inviolabilité du domicile dans les conditions prescrites par les lois de la République ;
- l'inviolabilité de la propriété, sauf nécessité publique constatée conformément à la loi et sous condition d'une juste et préalable indemnité ;
- la sécurité des capitaux et des investissements affectés à des programmes établis ou approuvés par les autorités comoriennes ;
- le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent ;
- l'égalité de tous les citoyens devant la justice et le droit pour tout justiciable à la défense ;
- l'indépendance des juges.

Titre premier.
Dispositions générales.

Article premier.

L'archipel des Comores constitue une République fédérale islamique.
Chacune de ses îles principales gère librement, par l'intermédiaire de ses représentants élus, les affaires qui ne sont pas constitutionnellement attribuées aux institutions fédérales.

Article 2.

L'emblème national est le drapeau vert, frappé au centre d'un croissant et de quatre étoiles de couleur blanche.
L'hymne national est « Ouzima wa Massiwa ».
La devise de la République est « Unité - Justice - Progrès ».
Les langues officielles sont le français et l'arabe.

Article 3.

Dans le respect des particularités propres à chaque île, l'égalité des citoyens est assurée devant la loi sans distinction d'origine, de race, de religion ou de croyance.

Article 4.

La souveraineté appartient au peuple qui l'exerce, dans chaque île et dans l'ensemble de la République, par ses représentants et par la voie du référendum. Aucun groupement ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice.
Dans les conditions déterminées par la loi, le suffrage est universel, égal et secret. Il peut être direct ou indirect.
Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux comoriens des deux sexes, âgés de dix-huit ans au moins et jouissant de leurs droits civils et politiques.
Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement dans le respect de la souveraineté nationale, de la démocratie et de l'intégrité territoriale. La loi fédérale peut fixer le nombre des partis et groupements politiques.

Titre II.
Des institutions des îles.

Article 5.

Dans le respect de l'unité de la République, chaque île constitue une entité territoriale autonome qui s'administre librement et dont les organes sont le Gouverneur et le Conseil.
La commune est la collectivité territoriale de base. La loi de l'île en détermine la liste sans pouvoir ériger en commune une collectivité de mons de cent habitants.
Toute autre catégorie de collectivité publique est créée par la loi fédérale.
Les collectivités s'administrent librement par les conseils élus et dans les conditions prévues par la loi fédérale.

Article 6.

Chaque île est placée sous l'autorité d'un Gouverneur élu pour cinq ans au suffrage direct.
Le scrutin est uninominal. Le Gouverneur de l'île est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés. Si celle-ci n'est pas obtenue au premier tour de scrutin, il est procédé dans un délai de huit jours à un second tour de scrutin auquel peuvent seuls se présenter les deux candidats qui, le cas échéant après retrait de candidats plus favorisés, ont obtenu le plus de voix au premier tour.
En cas de vacance de la fonction de Gouverneur ou d'empêchement définitif constaté par la Cour suprême, saisie par le président de la République et statuant à la majorité de ses membres, les fonctions de Gouverneur de l'île sont provisoirement exercées par le président du Conseil de l'île. Le scrutin pour l'élection du nouveau Gouverneur a lieu, sauf cas de force majeure constaté par la Cour suprême, vingt jours au moins et quarante jours au plus après l'ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère définitif de l'empêchement.
Avant d'entrer en fonction, le Gouverneur prête serment de défendre les institutions et de remplir fidèlement les devoirs de sa charge.
La fonction de Gouverneur est incompatible avec l'exercice de tout autre mandat électif, de tout emploi public et de toute activité professionnelle publique ou privée.

Article 7.

Le Gouverneur assure dans l'île l'exécution des lois fédérales, à l'exception des mesures relevant des services fédéraux.
Il promulgue les lois de l'île dans le mois qui suit l'expiration du délai prévu à l'article 36 de la Constitution et en assure l'exécution.
Il exerce le pouvoir réglementaire, dans les matières que la Constitution ne réserve pas aux instances fédérales.
Il dirige l'administration de l'île, dispose des forces de police de l'île et peut demander au président de la République l'intervention de la police fédérale et des forces armées.
Sous réserve des dispositions statutaires applicables aux magistrats et aux fonctionnaires, il nomme aux emplois civils de l'île.
Il assure la tutelle des collectivités territoriales de l'île.

Article 8.

Le Gouverneur est assisté de commissaires nommés par lui et dont le nombre ne peut être supérieur à quatre.
Les commissaires assurent sous le contrôle du Gouverneur, et dans la limite des pouvoirs qu'il délègue à chacun d'eux, la direction de tout ou partie de l'administration de l'île.
Le Gouverneur désigne l'un des commissaires pour le remplacer en cas d'absence ou d'empêchement temporaire.
Les commissaires sont responsables individuellement devant le Gouverneur de l'île et collectivement devant son Conseil.
Il est mis fin collectivement à leurs fonctions si le Conseil de l'île met en cause leur responsabilité par le vote d'une motion de censure à la majorité des deux tiers des membres qui le composent.

Article 9.

Sur proposition motivée du Gouverneur de l'île, et après avis de la Cour suprême, le président de la République, en Conseil de gouvernement, peut prononcer la dissolution d'une des instances délibératives d'une île.

Article 10.

Des fonctionnaires, nommés par le président de la République, après consultation du Gouverneur, sont placés auprès de ce dernier pour assurer dans l'île la direction des services fédéraux.
Ils rendent compte régulièrement de leur mission au Gouverneur et, sur sa demande, au Conseil de l'île.

Article 11.

La loi de l'île détermine les ressources et les charges de son budget.
Ces ressources comprennent notamment :
- le produit des impôts directs perçus dans l'île au profit de son budget ;
- une quote-part du produit des impôts indirects perçus dans l'ensemble de la République ;
- les ressources extérieures affectées à l'île ;
- une part des ressources extérieures attribuées à la République sans affectation à une île.
Les impôts directs sont perçus au bénéfice du budget de l'île et des budgets de ses collectivités territoriales . La loi de l'île détermine l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts directs perçus au profit de son budget et les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales peuvent en percevoir à leur profit.
La loi fédérale détermine l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts indirects. Elle fixe entre 40 et 60 % la part de leur produit affecté au budget fédéral. Elle répartit le reste entre les îles proportionnellement à la population de chacune, sans qu'aucune puisse recevoir moins du dixième de ce solde.
Les ressources extérieures ne peuvent être acceptées que par la République. Cette acceptation peut prévoir leur affectation au bénéfice d'une ou plusieurs îles déterminées.
En cas de prévision déficitaire, le budget de l'île doit être approuvé par l'Assemblée fédérale.

Article 12.

Le Conseil de l'île est élu pour quatre ans au suffrage direct.
Dans chaque circonscription électorale, les électeurs sont appelés à élire un conseiller. La loi fédérale détermine les circonscriptions électorales dont le nombre ne peut être inférieur à dix, ni supérieur à trente cinq par île. Sous cette réserve, chaque circonscription doit comprendre de 4000 à 8000 habitants. La loi qui détermine les circonscriptions électorales ne peut être modifiée par l'Assemblée fédérale que conformément à une délibération du Conseil de l'île.
Le scrutin est uninominal. Ses modalités sont analogues à celles que prévoit l'article 6 de la Constitution.
Les fonctions de conseiller sont gratuites. Les conseillers peuvent recevoir, pour chaque session, une indemnité imputable au budget de l'île et dont le montant maximum est fixé par la loi fédérale.
Aucun conseiller ne peut être poursuivi, recherché, arrêté ou jugé qu'avec l'autorisation du Conseil, sauf en cas de flagrant délit.
Aucun conseiller ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou des votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions.

Article 13.

Le Conseil de l'île se réunit en mars et en décembre, sur convocation du Gouverneur. Le Gouverneur peut également le réunir en session extraordinaire. Il le réunit obligatoirement à la demande du président de la République ou de la majorité des membres qui composent le Conseil, sur un ordre du jour déterminé. La durée d'une session ne peut excéder quinze jours.
Le Conseil de l'île élit son président et son bureau. Il vote son règlement intérieur.
Le Conseil de l'île vote la loi en toutes matières à l'exception de celles que la Constitution réserve aux instances fédérales.
L'initiative des lois de l'île et le droit d'amendement appartiennent concurremment au Gouverneur de l'île et aux conseillers.
Le Conseil de l'île est obligatoirement consulté sur :
- la codification des coutumes ;
- la préparation et l'application des programmes pluriannuels de développement économique, culturel et social imputables au budget fédéral ;
- les concessions du domaine public fédéral situé dans l'île.

Titre III.
Des institutions fédérales.

Article 14.

Les institutions fédérales de la République sont :
- le président de la République et le gouvernement de la République ;
- l'Assemblée fédérale ;
- la Cour suprême.

Chapitre premier. 
Du président de la République et du gouvernement de la République.

Article 15.

Le président de la République veille au respect de la Constitution.
Il assure le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'État.
Il est garant de l'indépendance nationale, de l'unité de la République, de l'autonomie des îles, de l'intégrité territoriale et du respect des engagements internationaux.
Le président de la République promulgue les lois fédérales dans le mois qui suit l'expiration du délai prévu à l'article 36 de la Constitution. Il peut, avant l'expiration de ce délai, demander à l'Assemblée fédérale une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles. Cette nouvelle délibération ne peut être refusée.
Le président de la République assure l'exécution des lois par les services fédéraux.
Il dispose du pouvoir réglementaire pour l'exercice des compétences que lui réserve la Constitution.
Le président de la République dirige l'administration fédérale.
Il est le chef suprême des forces armées et de la police fédérale.
Il nomme aux emplois civils et militaires de la République.
Le président de la République conduit la politique extérieure de la République. Il négocie et ratifie les traités. Il négocie les accords internationaux concernant la République et une ou plusieurs îles.
Les traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs à l'organisation internationale, ceux qui concernent les domaines que la Constitution réserve à  la loi fédérale ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu'en vertu d'une loi.
Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie.
Le président de la République accrédite les ambassadeurs, les envoyés extraordinaires et les représentants auprès des puissances étrangères et des organisations internationales. Les ambassadeurs, les envoyés extraordinaires et les représentants des puissances étrangères et des organisations internationales sont accrédités auprès de lui.
Le président de la République confère les décorations de la République.
Le président de la République a le droit de faire grâce.

Article 16.

Le président de la République est élu pour six ans au suffrage direct. Il n'est rééligible qu'une seule fois.
Les candidats doivent être âgés d'au moins quarante ans et jouir de leurs droits civils et politiques. Chaque candidature doit être parrainée par les signatures de cinq élus par île.
Le scrutin est uninominal. Ses modalités sont analogues à celles que prévoit l'article 6 de la Constitution.
Avant d'entrer en fonction, le président de la République prête serment de défendre les institutions et de remplir fidèlement les devoirs de sa charge.
La fonction de président de la République est incompatible avec l'exercice de tout autre mandat électif, de tout emploi public, et de toute activité professionnelle publique ou privée.

Article 17.

Le président de la République nomme le premier ministre. Il met fin à ses fonctions.
Le premier ministre dispose du pouvoir réglementaire pour l'exercice des compétences déléguées par le président de la République. Il ne peut subdéléguer ce pouvoir.
Sur proposition du premier ministre, le président de la République nomme les autres ministres au nombre maximum de neuf. Il met fin à leurs fonctions dans les mêmes formes.
Les fonctions du premier ministre ou des ministres sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat électif et de toute activité professionnelle publique ou privée.

Article 18.

Le président de la République préside le Conseil de gouvernement.
Il peut appeler les gouverneurs à y siéger, mais sans prendre part aux votes.

Article 19.

Sous le contrôle du président de la République, et dans la limite des pouvoirs qu'il délègue à chacun d'eux, le premier ministre et les ministres appliquent la politique définie par le président de la République et assurent la direction de tout ou partie de l'administration fédérale. Ils peuvent subdéléguer les pouvoirs qu'ils reçoivent. Ils veillent à la coordination des actions des îles.
Ils en sont individuellement responsables devant le président de la République et collectivement devant l'Assemblée fédérale.
Il est mis fin collectivement à leurs fonctions si l'Assemblée fédérale met en cause leur responsabilité par l'adoption d'une motion de censure déposée par le quart au moins des députés et votée à la majorité absolue des membres qui composent cette Assemblée.

Article 20.

Les actes du président de la République sont contresignés par le premier ministre et les ministres chargés de leur exécution.

Article 21.

Le président de la République est suppléé par le premier ministre en cas d'absence ou d'empêchement temporaire. Si le premier ministre est lui-même aussi absent ou empêché, le président de la République est suppléé par le ministre qu'il a lui-même délégué.
Aucun acte de nature à modifier la Constitution ou les options fondamentales de la République ne peut être pris pendant cette période.

Article 22.

En cas de vacance de la présidence de la République ou d'empêchement définitif constaté par la Cour suprême saisie par le gouvernement et statuant à la majorité de ses membres, les fonctions de président de la République sont provisoirement exercées par le président de l'Assemblée fédérale. Le scrutin pour l'élection du nouveau président a lieu, sauf cas de force majeure constaté par le Cour suprême, vingt jours au moins et quarante jours au plus après l'ouverture de la vacance ou la déclaration du caractère définitif de l'empêchement.
Le président intérimaire ne peut prononcer la dissolution d'une instance délibérative et aucun acte de nature à modifier la Constitution ou les options fondamentales de la République ne peut être pris jusqu'à l'entrée en fonction du nouveau président.

Article 23.

Le président de la République peut, après consultation du premier ministre et des présidents de l'Assemblée fédérale et de la Cour suprême, prononcer la dissolution de l'Assemblée fédérale.
De nouvelles élections ont lieu, sauf cas de force majeure, constaté par la Cour suprême, vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution.
L'Assemblée fédérale se réunit de plein droit le deuxième vendredi qui suit son élection. Si cette réunion a lieu en dehors des périodes prévues pour les sessions normales, une session est ouverte de droit pour une durée de quinze jours.
Une nouvelle dissolution ne peut intervenir dans les douze mois qui suivent ces élections.

Article 24.

Lorsque les institutions constitutionnelles, l'indépendance de la nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacées d'une manière grave et immédiate, et que le fonctionnement régulier des institutions constitutionnelles est interrompu dans deux îles au moins, le président de la République, après consultation officielle du premier ministre et des présidents de l'Assemblée fédérale et de la Cour suprême, prend les mesures exceptionnelles exigées par les circonstances.
Ces mesures doivent être inspirées par la volonté d'assurer aux institutions constitutionnelles, dans les moindres délais, les moyens d'accomplir leur mission.
Le président de la République en informe la nation par message.
L'Assemblée fédérale se réunit de plein droit. Elle ne peut être dissoute pendant l'exercice des pouvoirs exceptionnels. Elle peut mettre fin à ces pouvoirs par un vote à la majorité des deux tiers des membres qui la composent.

Chapitre II.
De l'Assemblée fédérale.

Article 25.

L'Assemblée fédérale est élue pour cinq ans au suffrage direct.
Dans chaque circonscription électorale, les électeurs sont appelés à élire un député. La loi fédérale détermine les circonscriptions électorales dont le nombre ne peut être inférieur à cinq par île. Sous cette réserve, chaque circonscription doit comprendre de 6000 à 11.000 habitants. La loi qui détermine les circonscriptions électorales ne peut être modifiée par l'Assemblée fédérale que conformément à une délibération du Conseil de l'île ou des îles concernées.
Le scrutin est uninominal. Ses modalités sont analogues à celles que prévoit l'article 6 de la Constitution.
La loi fédérale fixe la rémunération des députés et les indemnités qui peuvent leur être allouées.
Aucun député ne peut être poursuivi, recherché, arrêté ou jugé pendant les sessions de l'Assemblée fédérale. En dehors des sessions, un député ne peut être poursuivi, recherché, arrêté ou jugé qu'avec l'autorisation de l'Assemblée fédérale, sauf en cas de flagrant délit.
Aucun député ne peut être poursuivi, recherché ou arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions ou des votes émis par lui dans l'exercice de ses fonctions.

Article 26.

Le président de l'Assemblée fédérale est élu au début de la législature pour la durée de celle-ci.
L'Assemblée fédérale vote son règlement intérieur qui détermine notamment la composition de son bureau et les modalités de son élection.

Article 27.

L'Assemblée fédérale se réunit chaque année en deux sessions ordinaires sur convocation du gouvernement.
La première session commence entre le 1er et le 30 avril et la seconde entre le 1er et le 31 octobre. La durée de chacune des sessions ne peut excéder quarante cinq jours. Elles sont ouvertes et closes par décrets pris en Conseil de gouvernement.
L'Assemblée fédérale peut être réunie en session extraordinaire dans les mêmes formes, soit à l'initiative du président de la République soit à la demande de la majorité des membres qui la composent, sur un ordre du jour déterminé. La clôture intervient dès que l'Assemblée a épuisé l'ordre du jour pour lequel elle a été convoquée et, au plus tard, quinze jours à compter de sa réunion.

Article 28.

L'initiative des lois fédérales et le droit d'amendement appartiennent concurremment au président de la République et aux membres de l'Assemblée fédérale.
Les projets de loi sont délibérés en Conseil de gouvernement. Les propositions de loi et les amendements des députés ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique.
S'il apparaît qu'une proposition ou un amendement n'est pas du domaine de  la loi fédérale ou nest pas recevable en vertu de la disposition précédente, le président de la République peut opposer l'irrecevabilité. En cas de désaccord avec le président de l'Assemblée, la Cour suprême, à la demande de l'un ou de l'autre, statue dans un délai de huit jours.
En cas de contestation d'une disposition législative fédérale par la majorité des députés d'une île dans les quatre jours de son adoption, cette disposition fait l'objet d'une nouvelle lecture. Si, après cette nouvelle lecture, l'Assemblée fédérale l'adopte sans qu'elle ait recueilli les voix de la majorité des députés de l'île concernée, le président de la République peut refuser de la promulguer.

Article 29.

L'Assemblée fédérale vote les lois fédérales.

Article 30.

La loi fédérale fixe les règles concernant :
- les institutions constitutionnelles fédérales ;
- les modalités des élections du président de la République et des députés à l'Assemblée fédérale ;
- les juridictions fédérales ;
- la défense nationale ;
- les postes et télécommunications ;
- les transports extérieurs et entre les îles ;
- les établissements publics et fédéraux, les sociétés d'État et les sociétés d'économie mixte auxquelles la République participe ;
- le statut général des magistrats, des militaires et des fonctionnaires ;
- la nationalité ;
- l'immigration ;
- le droit civil, la procédure civile ;
- le droit pénal, la procédure pénale, l'amnistie ;
- la monnaie, le crédit ;
- le trésor ;
- le droit commercial et les règles applicables au commerce extérieur ;
- le droit du travail, y compris la réglementation du droit syndical et du droit de grève ;
- l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts perçus dans l'ensemble de la République ;
- les autres ressources de la République ;
- son budget qui doit être fixé chaque année par la loi des finances ;
- les programmes pluriannuels de développement économique, culturel et social imputables à ce budget ;
- les comptes de la République et des collectivités territoriales qui doivent être approuvés par l'Assemblée fédérale ;
- les investissements d'intérêt commun ;
- les expropriations dans l'intérêt de la République ou des collectivités territoriales ;
- le patrimoine national et la protection de l'environnement, y compris les forêts, la loi de l'île pouvant cependant renforcer la législation fédérale portant sur ces matières ;
- l'organisation de l'enseignement et l'institution des diplômes publics;
- l'organisation sanitaire, la loi de l'île pouvant cependant compléter cette organisation ;
- l'organisation de l'information ;
- l'utilisation des langues officielles, le choix des langues de travail et des langues d'enseignement ;
- les règles générales d'organisation des services publics fédéraux ;
- les matières dévolues à l'Assemblée fédérale par d'autres articles de la Constitution ou, en des termes identiques, par les conseils de trois îles au moins.
Si la loi des finances n'est pas votée au plus tard le 1er janvier de l'année en cours, le président de la République, un mois après le dépôt du projet, est autorisé à percevoir les impôts et ouvre par décret, en Conseil de gouvernement, des crédits provisoires annuels sur la base des recettes et des dépenses de l'année précédente.

Article 31.

Les lois fédérales s'appliquent dès leur promulgation, de la même façon, sur l'ensemble des îles de l'archipel.

Chapitre III.
De la Cour suprême.

Article 32.

La Cour suprême se compose :
- de deux membres choisis par le président de la République ;
- de deux membres élus par l'Assemblée fédérale ;
- d'un membre élu par le conseil de chaque île ;
- des anciens présidents de la République.
Les membres choisis par le président de la République sont désignés dès son entrée en fonction, les membres élus par l'Assemblée fédérale et les conseils des îles dès la première réunion de chacun d'eux. En cas de vacance ou d'empêchement définitif, de nouvelles désignations ont lieu dans le délai d'un mois.
Les membres de la Cour suprême sont nommés en raison de leur compétence, de leur honorabilité et de leur science des lois. Ils doivent être âgés au moins de trente-huit ans. Avant d'entrer en fonction, ils prêtent serment d'exercer leurs fonctions sans haine ni passion et dans le seul souci de la justice et de l'équité.

Article 33.

La Cour suprême siège en qualité de Conseil constitutionnel et de Haute Cour de justice.

Article 34.

A chaque renouvellement de l'Assemblée fédérale, les membres de la Cour suprême élisent parmi eux leur président et désignent en dehors d'eux le procureur qui, le cas échéant, exercera les poursuites devant la Cour siégeant en qualité de Haute Cour de justice. Dès sa désignation, le procureur prête serment d'agir sans haine ni passion et dans le seul souci de la justice et de l'équité.
La Cour suprême règle par ordonnance son organisation et les modalités de son fonctionnement.

Article 35.

Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l'élection du président de la République. Dans les conditions fixées par la loi, il examine les réclamations et proclame les résultats.
Le Conseil constitutionnel statue, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des députés à l'Assemblée fédérale, et sur celle de l'élection des gouverneurs et conseillers des îles.

Article 36.

Le Conseil constitutionnel statue, en cas de contestation, sur la constitutionnalité des lois et sur la constitutionnalité et la légalité des règlements.
Le président de la République, le président de l'Assemblée fédérale, les gouverneurs des îles, les présidents de leurs conseils et le Conseil constitutionnel reçoivent communication des projets et propositions de lois fédéraux ou des îles ainsi que des lois et règlements adoptés.
Les projets et propositions de loi ne peuvent venir en discussion moins d'un mois après cette communication. L'Assemblée ou le Conseil qui les délibère est informé des observations qu'ils ont appelées.
Le président de la République, le président de l'Assemblée fédérale, les gouverneurs des îles et les présidents de leurs conseils peuvent déférer au Conseil constitutionnel les projets et propositions de loi ou les lois et les règlements adoptés. Le Conseil constitutionnel doit être saisi dans les huit jours qui suivent la réception du texte. Il statue dans le même délai de huit jours.
Les lois ne peuvent être promulguées moins d'un mois après leur adoption ni, lorsque le Conseil constitutionnel en a été saisi, tant qu'il n'a pas statué. La même disposition s'applique à la publication des règlements.
S'il y a urgence, le délai d'un mois pour la discussion des projets et propositions de lois, pour la promulgation des lois et pour la publication des règlements est ramené à huit jours par décision du président de la République. Le vote et la promulgation des lois de finances sont toujours considérés comme urgents.
Les dispositions ci-dessus sont applicables aux lois autorisant la ratification d'un traité ou l'approbation d'un accord international.
Une disposition déclarée inconstitutionnelle ou illégale ne peut être promulguée ni publiée ni mise en application.
Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours.

Article 37.

Le Conseil constitutionnel peut être saisi pour avis sur la constitutionnalité ou la légalité d'une disposition par le président de la République, par celui de l'Assemblée fédérale, par les gouverneurs des îles et par les présidents de leurs conseils.

Article 38.

La Cour suprême siégeant en Haute Cour de justice statue sur la culpabilité du président de la République accusé de haute trahison dans l'exercice de ses fonctions et sur la culpabilité du premier ministre, des ministres et des gouverneurs des îles accusés d'avoir commis des crimes ou des délits dans l'exercice de leurs fonctions.

Article 39.

Le président de la République, le premier ministre et les ministres ne peuvent être mis en accusation que par l'Assemblée fédérale.
Le Gouverneur d'une île ne peut être mis en accusation que par le Conseil de cette île.
Les membres de l'Assemblée fédérale et du Conseil de l'île éventuellement appelés à participer à l'instruction ou au jugement, ne peuvent signer une proposition de mise en accusation ni prendre part au vote.
La proposition de mise en accusation doit avoir recueilli au moins les signatures des deux cinquièmes des députés de chaque île élus à l'Assemblée fédérale ou des conseillers de l'île admis à la signer.
Le vote a lieu trois jours au plus tôt et sept jours au plus tard après le dépôt de la proposition.
Le scrutin est public et nominal. La mise en accusation est votée si elle obtient les deux tiers des voix des membres composant l'Assemblée fédérale ou le Conseil de l'île admis à prendre part au vote.

Article 40.

L'Assemblée fédérale ne peut être dissoute par application de l'article 23 de la Constitution lorsqu'elle est saisie d'une proposition de mise en accusation.
Le Conseil de l'île ne peut être dissous par application de l'article 9 de la Constitution lorsque ce Conseil ou l'Assemblée fédérale sont saisis d'une proposition de mise en accusation.
Les articles 9 et 23 de la Constitution sont de nouveau applicables si la proposition est rejetée ou lors de l'arrêt de la Haute Cour de justice.

Article 41.

La mise en accusation est notifiée sans délai au procureur. La Haute Cour de justice statue dans un délai d'un mois à partir de la mise en accusation.
Si l'accusation est déclarée irrecevable ou si la culpabilité de l'accusé n'est pas reconnue, l'Assemblée fédérale ou le Conseil qui a voté la mise en accusation est automatiquement dissous.
Si l'accusé est reconnu coupable, il est automatiquement destitué de ses fonctions et l'arrêt de la Haute Cour de justice prononce les peines de droit.
Les décisions de la Haute Cour de justice ne sont susceptibles d'aucun recours.

Titre IV.
De la justice.

Article 42.

La justice est rendue sur tout le territoire de la République au nom de Dieu.

Article 43.

L'organisation, les compétences et le fonctionnement des juridictions sont fixés par la loi fédérale qui met en oeuvre les principes ci-après :
- la justice est indépendante du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif ;
- le président de la République est garant de l'indépendance des juges ;
- les audiences des juridictions sont publiques, sauf dans les cas limitativement énumérés ;
- nul ne peut être arbitrairement détenu ;
- tout prévenu est présumé innocent tant que sa culpabilité n'a pas été établie à la suite d'une procédure offrant les garanties indispensables à sa défense ;
- nul ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en vertu d'une loi postérieure à l'acte commis.

Titre V.
De la suspension et de la révision de la Constitution.

Article 44.

Lorsque le fonctionnement régulier des institutions constitutionnelles fédérales est interrompu par la force, les dispositions de la présente Constitution relatives à ces institutions sont suspendues et chaque île exerce provisoirement, sur son territoire, la totalité des compétences précédemment attribuées à la République fédérale.

Article 45.

L'initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au président de la République, au tiers des membres de l'Assemblée fédérale et au Gouverneur de chacune des îles.
Le projet ou la proposition doit être voté par l'Assemblée fédérale à la majorité des deux tiers des votants.
La révision est définitive si elle est approuvée par référendum à la majorité des suffrages exprimés dans l'ensemble de l'archipel et dans au moins trois îles.
Toutefois le président de la République peut décider de promulguer sans le soumettre au référendum le projet ou la proposition s'il a été adopté par les conseillers des îles et les députés à l'Assemblée fédérale réunis en congrès, à la majorité des deux tiers des membres qui composent le congrès.
Aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie si elle porte atteinte à l'intégrité de l'archipel.
Les caractères républicain, fédéral et islamique de l'État ne peuvent faire l'objet d'une révision.

Titre VI.
Dispositions transitoires.

Article 46.

La présente Constitution adoptée par le Directoire, sera soumise au référendum après avis d'une assemblée populaire.
Elle sera considérée comme ratifiée si elle est approuvée à la majorité des suffrages exprimés dans l'ensemble de l'archipel et dans trois îles au moins.

Article 47.

Les institutions prévues par la présente Constitution seront mises en place dans un délai de trois mois à compter de sa promulgation.
Dans l'île de Maoré [Mayotte], le délai de trois mois partira du jour où l'administration de l'île fera retour à la communauté comorienne.
Les autorités établies continueront d'exercer leurs fonctions jusqu'à l'installation des nouvelles autorités.
Les mesures législatives nécessaires à la mise en place des institutions et, jusqu'à cette mise en place, au fonctionnement des pouvoirs publics, seront prises par le Directoire dont les délibérations en ces matières auront force de loi.
Jusqu'à l'élection du président de la République, l'un des membres du Directoire exercera les compétences dévolues par la présente Constitution au président de la République.
Jusqu'à la désignation des membres de la Cour suprême, les compétences de cette Cour siégeant en qualité de Conseil constitutionnel seront exercées par un comité constitutionnel de huit membres désignés par le Directoire.

Article 48.

Pour la première élection du président de la République, chaque candidature devra être parrainée par huit membres au moins de l'Assemblée populaire, dont deux par île.

Article 49.

La présente loi sera exécutée comme Constitution de la République fédérale et islamique des Comores.

Pour obtenir davantage d'informations sur le pays et sur le texte ci-dessus,
voir la fiche Comores.