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Charles Fourniau : Annam-Tonkin 1885-1896. Lettrés et paysans vietnamiens face à la conquête coloniale. Travaux du Centre d'Histoire et Civilisations de la péninsule Indochinoise

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Charles Fourniau, Annam-Tonkin 1885-1896. Lettrés et paysans vietnamiens face à la conquête coloniale. Travaux du Centre d'Histoire et Civilisations de la Péninsule Indochinoise, Paris, L'Harmattan, 1989, 294 pages et cartes.

Cet ouvrage est issu de la volumineuse thèse d'État soutenue par l'auteur en 1983 à Aix-en-Provence : Les contacts franco-vietnamiens de 1885 à 1896 en Annam et au Tonkin. C'est une chronique intelligente de la mise en place difficile et progressive du pouvoir colonial sur la partie Centre et Nord du Viêt-Nam : conquête et problème du Tonkin en 1885 (ch. 1); résistance nationale et mise en place du pouvoir colonial, 1885-1887 (ch. 2, 3) ; années incertaines, 1887-1891 (ch. 4) ; échec de la guerre du soutien à la monarchie (Cân Vuong) et mise en place de l'ordre colonial, 1891-1896 (ch. 5). D'une lecture facile, il apporte une abondante documentation non sans points de vue nouveaux sur les événements et les acteurs du drame historique, notamment sur le gouvernement de Lanessan ou sur les liaisons tragiques entre les querelles politiques parisiennes et le sort du peuple vietnamien.

L'ouvrage mérite surtout les éloges pour sa rédaction et sa documentation. L'auteur nous a donné par citations ou descriptions des tableaux concrets (pp. 23, 86, 87) ou même pittoresques (p. 46) et l'aspect événementiel n'est pas le moindre mérite de la composition, solidement documentée par les archives d'Outre-Mer et de nombreux témoignages. Cependant il n'a pas pu développer autant qu'on pouvait l'espérer son titre : Lettrés et paysans ... Sans contester ses conclusions, nous aurions aimé voir mentionnées les incertitudes qui nous restent parce que l'essentiel de la vie dans les villages échappe encore à nos investigations. L'auteur a reconnu que les lettrés faisaient partie des notables (p. 109) et qu'ils n'en étaient donc qu'une partie, peut-être principale. Mais la traduction de van thân par lettrés (p. 284) ne nous paraît pas rendre compte de la complexité des aristocraties locales, comprenant aussi des gens aisés qui ne souhaitaient pas«devenir maîtres d'écoles ou mandarins, mais plutôt trouver des activités plus profitables matériellement : les témoignages en sont assez fréquents au moins depuis le xvur. La cour et l'administration impériales se méfiaient de ces notables influents dans les communes, et surtout des chefs de cantons qu'on voyait souvent à la tête des révoltes. Ils pouvaient donc être aussi importants que les lettrés dont ils recherchaient l'association pour des raisons techniques, ces derniers devant être considérés comme des juristes et connaisseurs de rites efficaces plus que comme littérateurs. Dans le passé, c'était ce genre de notables influents, dont Le Loi en 1418, plus que des «chefs paysans» (pp. 41, 277) qui avaient pris la tête des mouvements de résistance patriotique ou politique. L'aristocratie locale était animée par la loyauté (trung) confucéenne envers l'État et le souverain (pourvu que ce dernier respectât les principes fondamentaux, sût écouter les sages et défendre la patrie), mais aussi par l'entente avec le génie tutélaire de la commune, champion surnaturel des libertés locales contre toute oppression. Nous sentons l'importance et la complexité de ces aristocraties locales, sans malheureusement encore pouvoir apprécier assez finement leurs éléments. Mais nous observons que le succès de la révolte des Tây Son, un siècle plus tôt avait tenu à leur capacité d'utiliser le mécontentement paysan, et aussi le désir d'activités plus profitables comme le commerce. Une cause essentielle de l'échec de la résistance Cân Vuong à la fin du xixe siècle pourrait bien avoir été l'insuffisance du programme réformateur des grands lettrés, et leur incapacité de mobiliser pleinement l'énergie des notables en leur ouvrant un nouvel avenir politique et économique. On sait qu'au Vietnam, comme en Corée, le parti réformateur fut gêné parce que suspect de

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