Chine et Etats Unis: Devenir, Changement et Discontinuité

Un pouvoir géo-économique tend à devenir un pouvoir géopolitique.

C’est l’objectif à moyen-long terme de Xi Jinping. 

De Nixon a Trump et de Mao a Xi

President Xi Jinping a divisé l’histoire de la révolution socialiste chinoise en trois périodes de 30 ans ; la première dominée par la « Pensée de Mao Zedong », la seconde dominée par la «Théorie de Deng Xiaoping», et la nouvelle période devant être dominée par la «Pensée de Xi Jinping» sur le «socialisme à caractéristiques chinoises pour la nouvelle ère».

Grand Saut dans le Train de Vie de l’Occident

  • Selon la célèbre expression de Mao Zedong (interview de 1956), l’Amérique n’est qu’un « tigre de papier » (Zhi Laohu), c’est-à-dire qu’elle rugit comme un tigre mais demeure en réalité inoffensive et peut être facilement détruite.

Lorsque le président Richard M. Nixon a ouvert un dialogue avec la Chine communiste en 1971, il a lancé l’un des développements les plus significatifs de l’histoire diplomatique moderne.

Ironiquement, c’est cet anticommuniste fort qui a ouvert la voie à une politique plus souple à l’égard de la Chine. Cela a entraîné un réalignement du pouvoir dans le monde de la guerre froide et a permis à Nixon de mener une politique moins conflictuelle – de détente – avec les Soviétiques.

« Il a fallu que Nixon se rende en Chine » signifie désormais que seule une personne à la réputation difficile peut faire basculer sa politique. En dépit de la percée diplomatique de Nixon, il a été critiqué pour sa trop grande propension a etre le seul initiateur et realisateur d’un tel exploit.

La caricature dessinée par Mort Drucker, mettant Nixon en face le dirigeant chinois Mao Zedong remet les pendules a l’heure en faisant allusion a la rencontre du tennis de table ayant pris lieu avec la célèbre visite en 1971 en Chine, de l’équipe américaine de tennis de table. Cette rencontre avait effectivement déclencher l’un des premiers signes d’un dégel entre les deux pays.

À la mort de Mao en 1976, une fraction du Parti communiste chinois, menée par Deng Xiaoping, entreprend de réformer l’économie. Observant l’extraordinaire développement économique de sa voisine, la Corée du Sud, Deng Xiaoping décide de libéraliser l’économie chinoise tout en conservant le cadre politique communiste : c’est l’« économie socialiste de marché ». Comme il le dit lui-même dans un aphorisme : « Peu importe que le chat soit noir ou blanc, pourvu qu’il attrape les souris ! »  Deng engage en revanche une double libéralisation avec la fin du tout-Etat à l’intérieur et les débuts de l’ouverture avec l’extérieur (…)

« Nous vous sommes extrêmement reconnaissants d’effectuer cette visite. Je suis heureux de rendre l’hospitalité que votre pays et ses dirigeants nous ont offerte durant les six dernières années en recevant les présidents Nixon et Ford, les secrétaires d’État Kissinger et Vance, le Dr Brzezinski […]. Vous avez reçu des délégations officielles américaines à quatorze reprises depuis 1971. Ainsi, le score est aujourd’hui de quatorze à un. Nous invitons vos dirigeants, le Premier ministre Hua comme d’autres, à nous rendre plus de visites, afin que nous puissions égaliser ce score ! »

Tels furent les premiers mots du président des États-Unis Jimmy Carter, en cette fin du mois de janvier 1979, en recevant Deng Xiaoping à Washington. Il faisait écho au secrétaire d’État Cyrus Vance qui, le 26 janvier, lui avait écrit que la visite de Deng symbolisait à la fois une fin et un commencement. La fin d’un processus de rapprochement tout d’abord, puisqu’il avait fallu sept années avant que la République populaire de Chine (RPC) finisse par effectuer aux États-Unis l’équivalent de la visite historique à Mao Zedong du président Richard Nixon en 1972 (précédée par la mission secrète d’Henry Kissinger en 1971). La fin d’une ère ensuite, celle de l’isolement de la RPC, marquée par l’établissement de relations diplomatiques officielles avec les États-Unis le 1er janvier 1979.

Source: Deng Xiaoping aux États-Unis : « le grand bond en Occident »

Croissance Economique et Ouverture Internationale, Résistance Nationale Politique

La Vision de Deng Xiaoping

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« Il n’y a pas lieu de redouter la multiplication des entreprises étrangères, dès lors que l’on garde son sang-froid.   Nous avons en effet notre supériorité intrinsèque, ainsi que nos grandes et moyennes entreprises d’Etat, nos entreprises rurales, et surtout … le pouvoir est entre nos mains. Les hommes d’affaires étrangers veulent gagner de l’argent. L’Etat, quant à lui, en retire des recettes fiscales, les ouvriers leur salaire, et, de surcroît, nous pouvons apprendre en matière de technologie et de gestion, en retirer des informations, et nous ouvrir de nouveaux marchés.

Plan et marché ne sont que des procédés. L’essence du socialisme, c’est la libération et le développement des forces productives, l’abolition de l’exploitation, pour aboutir en fin de compte à une prospérité commune. Voilà une vérité qui doit s’imposer à tout un chacun. La Bourse, par exemple, est-elle bénéfique ou dangereuse, est-elle propre au capitalisme, ou bien a-t-elle sa place dans un système socialiste ? Elle n’est pas un fruit défendu, mais il faut l’expérimenter de façon résolue. Si cela marche, on peut l’étendre après un ou deux ans. […à En un mot, si l’on veut faire ressortir la supériorité du socialisme sur le capitalisme, il convient d’absorber, d’emprunter avec audace tout élément de civilisation créé par les sociétés humaines, tous les modes d’organisation et de gestion performants propres à chaque nation du monde d’aujourd’hui, y compris aux pays développés capitalistes. »

Quand La Chine se Réveillera, l’Ouest en Pâtira

Le 1er janvier de 1979, les États-Unis reconnaissent diplomatiquement la république populaire de Chine, délaissant les autorités de Taïwan. Les contacts commerciaux entre la Chine et l’Occident commencent à se développer.  

L’entreprise aéronautique Boeing annonce la vente de plusieurs avions 747 aux compagnies aériennes de la RPC, et la compagnie de boissons Coca-Cola rend publique son intention d’ouvrir une usine de production à Shanghai. 

Dès lors, les réformes économiques d’inspiration libérale s’accélèrent, bien que la rhétorique de style communiste soit conservée.  Le système des communes est progressivement démantelé et les paysans commencent à avoir plus de liberté pour gérer les terres qu’ils cultivent et vendre leurs produits sur les marchés.   Dans le même temps, l’économie chinoise s’ouvre vers l’extérieur.   

  • Des zones économiques spéciales (ZES), dans lesquelles les investissements étrangers sont autorisés, sont créées sur le littoral, à Shenzen, Zhuhai, Shantou, Xiamen…
  • Les campagnes sont dé-collectivisées : chaque paysan produit désormais dans son propre intérêt.

Grâce à l’ouverture commerciale et à l’apport de capitaux internationaux (qui proviennent pour 50 % des Chinois de Hong Kong, de Singapour et de Taïwan), la Chine peut enfin faire jouer son avantage comparatif majeur : une main-d’œuvre nombreuse, disciplinée et bon marché (« pays atelier »). Dès lors, les implantations industrielles se multiplient, mi-chinoises, mi-étrangères : usine de télécommunications Bell (États-Unis) à Shanghai, usines automobiles Jeep (États-Unis) à Pékin (Beijing), Volkswagen (RFA) à Shanghai, Peugeot (France) à Guangzhou, etc. 

La Chine a ainsi fait, en l’espace d’une seule génération (trente ans) sa « révolution industrielle », cette phase de décollage économique que l’Europe et l’Amérique avaient connue un siècle et demi plus tôt et qui avait nécessité, dans ces régions-là, deux ou trois fois plus de temps.

Tout en Chine s’est fait beaucoup plus rapidement : le transfert de l’agriculture vers l’industrie, de la campagne vers les villes, l’émergence d’une classe moyenne et les débuts d’une consommation de masse. La production y a ainsi progressé en moyenne de près de 10 % par an. Elle a été multipliée par sept en trente ans. Du jamais-vu.

Jamais en effet dans l’histoire économique un pays aussi grand n’a connu une croissance aussi forte pendant une période aussi longue. Cela étant, malgré ses milliardaires, ses villes champignons et son appétit pour le luxe occidental, la Chine est au début du XXIe siècle un pays riche peuplé de pauvres, un pays jeune mais à la population vieillissante avant même de s’être enrichie. Numéro deux, derrière les Etats-Unis, par son produit intérieur brut total, elle se situe en fond de classement, pas loin de la 100e place, si l’on prend en considération le produit intérieur brut par habitant – un indicateur plus pertinent du niveau de vie de la population. (…)

Pour maintenir son rang, comme le suggère le XIIe Plan, la Chine doit désormais passer d’une croissance alimentée par l’exportation, l’investissement et la copie à une croissance fondée sur la consommation des ménages, les services et l’innovation. « Communiste », la Chine a en réalité besoin d’une double révolution : « socialiste », avec la mise en place d’un Etat-Providence, et « libérale », avec l’instauration d’un Etat de droit, le développement de réels contre-pouvoirs et la promotion de l’esprit d’initiative.   Le Parti et l’Etat disent y travailler. C’est par exemple l’objectif du projet visant à assurer une protection minimale à tous les citoyens en matière de santé, de chômage ou de retraite. C’est aussi celui recherché avec l’effort mis sur l’éducation et la formation de haut niveau.

Depuis une vingtaine d’années, cependant, la Chine progresse très rapidement. C’est même le pays au monde où la croissance économique est la plus forte. Le PIB a ainsi progressé de 8,2 % par an entre 1975 et 2002 et de 8,6 % par an entre 1990 et 2002, soit une multiplication par 2,5 en 12 ans, par presque 8 en 27 ans ! Aucun autre pays ne peut se prévaloir d’un tel développement économique qui a placé la république sur les rails qui en font aujourd’hui la seconde puissance du monde.

Lire plus dans: « Un Model Chinois pour une « Nouvelle Ère » par Sean Golden, traduction de l’Anglais et Publié 27 mars 2018 par Gabriel Solans

La Nouvelle Chine: Entre la Mondialisation et le Libre-Echange

 .  Les réformes économiques lancées par Deng Xiaoping se traduisent par une accélération sans précédent de la croissance économique et des investissements étrangers en Chine pendant les années 1990.  La politique de Deng a permis à des centaines de millions de Chinois de sortir de la pauvreté relativement parlant.  La Chine est aujourd’hui, globalement, un pays intermédiaire, bien loin de la grande pauvreté. Son IDH (0,745) la place au 94e rang mondial (sur 177 pays). Son PIB PPA s’élève à 4 580 dollars par habitant, en progrès constants. De tels chiffres ne sont cependant que des moyennes : pour la population rurale, ils sont très nettement inférieurs. Sous certains aspects, la Chine des années 2000 reste un pays pauvre.

Pour atténuer tels dérapages sociaux, la Chine concentre son développement  économique sur les potentialités internes de son gigantesque marché et se tourne vers l’extérieur pour l’extraction des valeurs ajoutées a travers des investissements directs et des délocalisations de certaines industries pouvant concurrencer dans la pénétration des marches porteurs, de l’Afrique, l’Amérique Latine et d’Europe Occidentale.   Cette phase de mondialisation par le redéploiement et par l’accès et le transfert des ressources financières destinées a des investissements directs tant dans l’extraction et la transformation ainsi que la mise en valeur des ressources minières et cela pour alimenter les besoins d’un nouvel élan du développement des bases et des parts du marché intérieur chinois.

Pour le President Chinois, Xi Jinping, la mondialisation constituait une «lame à double tranchant» aux conséquences négatives potentielles et qu’il fallait la «rééquilibrer».   Face au Leader Américain, Donald Trump qui préconise et continue de vouloir stimuler la croissance de l’économie américaine a travers des mesures ciblées protectionnistes et des barrières douanières visant des produits spécifiques, alors que le chef du gouvernement chinois rappelle et met l’accent dans ses interventions sur les bénéfices de la globalisation.

Dans la nouvelle ère que Xi a proclamée, la Chine offre une situation gagnant-gagnant.

Par ailleurs, et pour s’assurer une place prédominante dans le marché mondial, la Chine ne se contente plus d’exporter.  Elle développe aussi ses propres marques (Huawei est en train de dépasser Samsung et Apple dans le marché des smartphones), achète ou participe dans des marques existantes (Peugeot et Volvo dans l’automobile, Kuka dans la robotique, Club Med dans le tourisme, Air France dans l’aviation….etc.).  Le Model Réel du Développement de l’économie chinoise dépend moins de ses exportations et plus de son énorme marché intérieur. 

La Chine a décidé d’augmenter les salaires et de construire une société de couches moyennes.

Face a une telle volonté et malgré toutes les tentatives de faire reculer la Chine a un rôle de suiveur de la globalisation, l’Administration de Washington semble actuellement hésiter sur les méthodes et les décisions a prendre en vue de négocier avec la Chine.  

Ainsi d’une position dure et sans concession tenue auparavant par President Trump, les États-Unis adoucissent la position commerciale de la Chine.  La Maison Blanche travaillera avec le Congrès pour renforcer la loi sur les investissements étrangers, au lieu de bloquer ceux de la Chine et d’autres pays qui impliquent la technologie américaine, selon le Wall Street Journal.

Le secrétaire au Trésor, Steven Mnuchin, a déclaré que le Comité des investissements étrangers aux États-Unis devrait être habilité à empêcher non seulement les acquisitions d’entreprises technologiques américaines, mais aussi les coentreprises entre les entreprises et celles d’outre-mer, rapporte CNBC. « Encore une fois, ce n’est pas seulement la Chine. C’est n’importe où « , a déclaré M. Mnuchin, réfutant des informations publiées plus tôt cette semaine, selon lesquelles l’administration cherchait à empêcher les sociétés dont plus de 25% de Chinois étaient propriétaires d’acheter des sociétés technologiques américaines.

En plus de ses investissements colossaux dans le monde (2017: 81 MM$ et 76% de progression en Europe uniquement), la Chine met en place une stratégie logistique d’envergure, afin de faciliter l’écoulement de ses marchandises, à travers le monde.  Dénommée «One Belt One Road», c’est un maillage de plusieurs routes transcontinentales, aussi bien maritimes que terrestres, pour connecter la Chine au marchés de l’Asie du sud, de la Russie, de l’Europe et de l’Afrique australe.

NB: * Les indicateurs mentionnés ci-dessus reflètent les tendances et non les réalités des situations économiques et des conditions sociales. Pour cette raison, ils doivent être considérés comme reflétant des performances sélectives et comparatives étant donné que l’économie mondiale peut être définie, estimée, évaluée, mais peut aussi être exprimée dans diverses autres formes et indications. « On ne sait pas, par exemple, combien des 7,13 milliards de personnes dans le monde ont la plus grande partie de leur activité économique reflétée dans ces évaluations [mentionnées ci-dessus]. »

Aujourd’hui, comme autrefois, la Chine a opté pour les échanges et le commerce comme moyen de maintenir un ordre mondial pacifique et stable, plutôt que l’expansionnisme et la domination militaire.

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