Le nouveau Chereau raconte deux ans de Covid : un livre d’histoire… drôle


Un livre d’art, d’histoire contemporaine, une fresque politique, sociale, scientifique, humaine hautement décapante… : le nouvel album de Chereau retrace « joyeusement » deux ans de Covid.

Plus de 250 dessins accompagnés de textes percutants rappellent les errements, les égarements, les incompréhensions de tous, politiques, médecins, journalistes, soignants, malades…

C’est drôle à pleurer.

L’Art de la Covid à la française, le nouvel album de Chereau, vient de paraître.

Au menu, art, histoire contemporaine… et humour.

Alors qu’un de ses amis venait de lui confier sa ferme intention d’écrire un livre racontant son confinement, l’écrivain et journaliste Sorj Chalandon l’en avait immédiatement dissuadé. « Tu sortirais ça au moment où les gens n’auront qu’une envie, passer à autre chose, avait-il argumenté. Et certainement pas de retrouver à travers toi ce qu’ils ont vécu à l’identique. »

Tartiner sur « son » confinement, nombreux s’y sont malgré tout essayés. Résultat, des recueils à ego – à gogos – sans grand intérêt, et, pour cause, sans grand succès.

L’art de la Covid à la française, le nouvel album de Chereau, n’est pas de ces ouvrages opportunistes, de circonstance, rédigés à la va-vite, au gré de vocations « littéraires » hasardeuses… Le dessinateur n’y évoque pas sa propre expérience de la pandémie et des contraintes qu’elle a engendrées.

Chereau raconte toute l’histoire, tout le déroulement, semaine après semaine, mois après mois de ce qui a affecté et infecté les Français deux ans durant.

Il ne parle pas de lui, ne se raconte pas, ne se la raconte pas. Il retrace – dessins bien sûr, mais aussi textes tout aussi incisifs à l’appui – l’histoire, toute l’histoire, tout le déroulement, semaine après semaine, mois après mois de ce qui a affecté et infecté les Français deux ans durant.

Un « rappel » quasi mémoriel, une mise en perspective précieuse, salutaire au vu des amnésies précoces de l’époque. Le tout traité comme il se (le) doit avec l’humour qu’on lui connaît, jamais gratuitement « méchant », mais sans la moindre hésitation ou concession.

Avec ce regard qui se pose toujours sur l’essentiel et n’ignore rien non plus de ce qui apparaît en filigrane, en creux, abrité en coulisses… Qui appuie sur ce qui fait – un peu, beaucoup – mal, qui dérange, qui interroge… Et déclenche tous les rires, par éclats irrépressibles, de bon cœur, jaune aussi forcément, et pour ne pas pleurer…

Tout y est, la découverte du pangolin, les masques qui manquent, qui tombent, les familles désemparées, les soulagements éphémères, les nouvelles vagues…

Tout y est, la « découverte du pangolin », l’incrédulité des premiers temps, les errements qui ne tardent pas, le vol à vue, les masques qui manquent, qui tombent, les marchands de certitudes, l’émergence de charlatans pas seulement échevelés, les affirmations péremptoires aussitôt démenties, les familles désemparées, les replis sur soi, les vomitives dénonciations, les recherches, les trouvailles, les flops, les réticences, les dénégations, les soulagements éphémères, les rebonds, les nouvelles vagues…

Chereau parle des autres, de tous les autres, les croque, sans ménagement  : acteurs, de la lumière et de l’ombre, bons comme mauvais, aguerris comme débutants, roués et novices, pétris de savoirs (y compris prétendus) comme ignorants, victimes, vraies autant qu’ autoproclamées…

Personne n’est en reste, les cadors, les premiers de cordée…

Personne n’est en reste. Les cadors, les premiers de cordée,  – Macron, Philippe, Castex, Véran, Buzyn… – y ont droit. Les seconds couteaux ne sont pas épargnés, l’oubliable Sibeth, le préfet au patronyme inquiétant, Notre-Drame de Paris… Les p’tites stars du p’tit écran, Hanouna, Praud et consort… Les médecins aussi, le « roi » Salomon, l’ineffable Raoult, les praticiens sans notoriété devenus abonnés ébahis du 20 h…

Les médecins aussi, le « roi » Salomon, l’ineffable Raoult…

Et (surtout ?) les Français – grands, moyens, petits… -, dépassés, consternés, ballotés, hospitalisés, perdus, incrédules… Mesquins et complotistes à l’occasion… Les soignants aussi, acclamés et vilipendés, pressurisés et peu écoutés… 

Plus de 250 dessins, tous léchés, travaillés et imprimés avec grand soin, accompagnés, ponctués de commentaires, de citations savoureuses comme navrantes (« Je suis assez enthousiaste de me dire que Sibeth Ndiaye, par ses compétences et son parcours, est en train de devenir un rôle modèle pour plein de jeunes filles », Marlène Schiappa), racontent ces deux années chaotiques, douloureuses, révélatrices de beaucoup de maux mis jusqu’alors sous le tapis…

Pas un livre sur le confinement, non, un livre d’art grand format au propre comme au figuré, un vrai livre d’histoire contemporaine (à conseiller aux enseignants d’histoire, de sociologie… et d’arts plastiques), un livre drôle, un livre pour les fêtes qui approchent…

Pour se souvenir, rire, réfléchir…

Rodolphe Pays   

L’Art de la Covid à la française, dessins d’Antoine Chereau, textes d’Antoine et Isa Chereau, chez Pixel Fever Editions, 152 pages, 29 euros.

En savoir plus, commander l’ouvrage : www.antoinechereau.fr

« Lors du premier confinement, un peu pour contribuer à dédramatiser une situation inédite et anxiogène, j’ai publié des dessins sur le sujet dans les réseaux sociaux. Au bout d’un certain temps, j’ai même envisagé de les réunir dans un album. Sans plus.

Mais, voyant que cette période si particulière n’allait pas s’arrêter de sitôt, qu’elle était éprouvante et bouleversante pour tout le monde, j’ai persévéré, j’ai voulu approfondir, en raconter le plus possible, tout couvrir. Ca a donné cet album… » Antoine Chereau

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