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Un montage des portraits de Joe Biden et de Vladimir Poutine.
Un montage des portraits de Joe Biden et de Vladimir Poutine.
©AFP

Géopolitico-Scanner

Suite de l’entretien d’Alexandre Del Valle avec l’universitaire italien et spécialiste de l’Ukraine Leonardo Dini.

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle

Alexandre del Valle est un géopolitologue et essayiste franco-italien. Ancien éditorialiste (France SoirIl Liberal, etc.), il intervient dans des institutions patronales et européennes, et est chercheur associé au Cpfa (Center of Foreign and Political Affairs). Il a publié plusieurs essais en France et en Italie sur la faiblesse des démocraties, les guerres balkaniques, l'islamisme, la Turquie, la persécution des chrétiens, la Syrie et le terrorisme. 

Son dernier ouvrage, coécrit avec Jacques Soppelsa, Vers un choc global ? La mondialisation dangereuse, est paru en 2023 aux Editions de l'Artilleur. 

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Leonardo Dini

Leonardo Dini

Leonardo Dini est philosophe du droit, expert en politique nationale et internationale. Il est également auteur de plusieurs ouvrages.

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Alexandre del Valle : Vous considérez que la guerre en Ukraine est porteuse des germes d’une Troisième Guerre mondiale, voire qu’elle est déjà engagée. Aurions-nous pu l’éviter et est-il vraiment trop tard pour stopper un engrenage infernal ?

Leonardo Dini : La Troisième Guerre mondiale est déjà là..., pour ceux qui ne veulent pas faire semblant de l'ignorer. Le Pape en parle déjà depuis un an. La réalité géopolitique est déjà ainsi. L'Ukraine, telle que nous la connaissions historiquement, est en train de devenir involontairement le centre du monde : tous les principaux pays de la planète sont aujourd'hui impliqués, pour diverses raisons, dans la crise actuelle : pour l'envoi des armes, pour l'énergie, pour le grain, le blé, dans l'hypothèse des négociations, ou pour le jeu des positions au sein de l'Assemblée des Nations Unies.

La question est maintenant de savoir qui sortira vainqueur de cette guerre mondiale, du point de vue militaire, conventionnel direct, par mer, par terre. A mon sens, si les attaques du camp d'en face ne sont pas évitées par une action surprise préventive, l'OTAN, l'Amérique et l'Europe peuvent paradoxalement être vaincus ou peut-être plutôt décrocher une victoire à la Pyrrhus (c'est-à-dire éphémère). La Chine, la Russie, la Corée, l'Iran, l'Inde et la Turquie, si elles sont associées, finiraient vainqueurs avec un "Yalta à l'envers". 

Dans ce cas, le nouvel ordre mondial multilatéral serait toujours exposé à une "quatrième guerre mondiale de revanche" contre l'Occident, et ce serait là un monde dicté et guidé par des dictatures : russe, chinoise, coréenne, iranienne, donc un ordre international non souhaitable et tout sauf constructif. A contrario, ce serait tout autre chose si de cette guerre mondiale hybride émergeait un monde multilatéral réel, dirigé par de vraies démocraties, comme le sont certains pays des Bric comme le Brésil, l'Afrique du Sud, l'Inde, ceci aux côtés de pays comme le Canada, l'Australie et le Japon. Dans ce cas, le G20 pourrait prendre la place de l'actuel G7.

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ADV : Et si la coalition occidentale gagne ?

LD : Pour éviter la guerre mondiale, il aurait fallu trouver un gentlemen’s agreement avec La Russie, similaires aux accords Salt conclus entre Reagan et Gorbatchev. Peut-être Trump pourrait-il le faire, certes pour un temps limité, s'il venait à être réélu en 2024. Il aurait fallu renforcer le dialogue et l'alliance ouest-est, mais la condition préalable nécessaire à un leadership démocratique en Russie est absente... Dans le futur, est-ce que Navalny sera le Nelson Mandela de la Russie, en cas de mise de Poutine en dehors du pouvoir, ou bien la Russie poursuivra-t-elle sa course impérialiste, en concurrence avec les Chinois et les Américains?  

ADV : Est-il trop tard pour négocier avec la Russie, sachant que récemment, après le Pape François, les présidents Biden et Macron ont eux-mêmes évoqué une possibilité de reprise de pourparlers? 

LD : Il ne faut jamais dire jamais. Les cas de personnalités désireuses de dialogue le prouvent, comme par exemple Abramovich, Erdogan, Musk, le Pape, Macron et même Biden dans une moindre mesure comme vous l'évoquiez, sans oublier hier le premier Ministre israélien Bennet et pourquoi pas à nouveau Benjamin Netanyahou, à peine revenu aux affaires en Israël.

D'un point de vue réaliste, nous avons bien glissé - avec toutes les conséquences relatives - dans un conflit mondial, comme Poutine lui-même l'avait déjà déclaré à Davos en 2007, et l'on sait que des guerres mondiales, on sort toujours... mais après 4 années pour la première guerre mondiale, 6 pour la deuxième et qui sait combien pour la Troisième en cours... Nostradamus l'a prévue comme une guerre de "27 ans", et l'on se souvient de la fameuse guerre de Trente Ans, qui s'est terminée par la paix de Westphalie. Ce qui est certain, c'est que la Troisième guerre mondiale redéfinira les frontières de l'Europe, pour de nombreuses années, peut-être pour des siècles. 

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ADV : Étant Italien d'ascendance française, que proposeriez-vous, si vous étiez Conseiller d'Emmanuel Macron ou de Giorgia Meloni, pour sauver l'économie et la paix ? Beaucoup en Allemagne qualifient les sanctions de suicide ? Qu'en pensez-vous?

LD : Je conseillerais à Macron et Meloni d'initier une tentative de nouveaux "accord de Minsk2 eurasiatiques", une médiation entre les représentants gouvernementaux les plus modérés et équilibrés qui existent en Europe sur cette question épineuse, donc non seulement le trio européen qui compte le plus Macron, Scholz et Meloni, flanqué de personnalités comme Merkel ou Berlusconi et Sarkozy qui seraient envoyés comme "ambassadeurs de la paix" à Moscou, donc des interlocuteurs efficaces face à Poutine.En ce qui concerne les sanctions, je les modulerais plus rationnellement et j'enlèverais le côté automutilation, en se concentrant sur le plafonnement des prix et l'interdiction du chantage sur le gaz et le pétrole en vogue à Moscou. Et j'accorderais plus d'attention aux investissements et aux comptes des dirigeants russes en Suisse, à Dubaï et dans les États paradis fiscaux off-shore en général qui sont toujours hors limites des blocs.

ADV :Êtes-vous d'accord avec la proposition d'Elion Musk d'organiser des referendums au Donbass et dans autres régions prorusses (outre la Crimée de facto comme russe) puis de faire de l'Ukraine un pays jamais membre de l'OTAN et neutre ?

LD : Pas du tout ! Parce qu'il s'agit de choses déjà dites qui n'ajoutent aucune proposition nouvelle, d'autant que ceci n'est pas une hypothèse valable.

ADV : Les Occidentaux ont-ils donc raison de refuser de dialoguer avec Moscou?

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LD : A ce stade, ils ont raison, car le dialogue, sans le retour en Ukraine au moins de Kherson et de la région de Zaphoriza, le dialogue est impossible. Pour Kherson, la chose semble faite mais à moitié... Aujourd'hui, le statu quo en Ukraine se concrétiserait dans une situation similaire à l'Ossétie du Nord, en Géorgie, ou à l'instar de la dispute infinie à Chypre, entre Turcs et Grecs depuis 1975, ou encore entre Turcs et Arméniens ou entre Azerbaïdjanais et Arméniens. Il est clair que même en cas d'annexion de toute l'Ukraine, la Russie n'aurait jamais la paix. L'Ukraine serait la nouvelle Tchétchénie, plus que la "nouvelle Russie" ("nova rossia", comme elle appelle les régions sud et sud-est de l'Ukraine russophones). Par contre, je crois aux tentatives françaises de négociation, les seules concrètes et productives jusqu'à présent. L'hypothèse Merkel, cependant, en tant qu'envoyée de paix de l'ONU, pour une négociation, pourrait avoir un sens. Par ailleurs, Erdogan joue un rôle ambigu - tout comme Israël, d'ailleurs pour d'autres raisons - pour pouvoir être le véritable aiguillon décisif de l'équilibre.

ADV : Sans parler de l'apocalypse nucléaire ou de IIIe guerre mondiale, comment éviter la catastrophe économique? Pensez-vous qu'un effondrement du système occidental est possible au regard du poids de l'énorme dette publique et privée américaine, européenne, mondiale qui s'est aggravée avec la crise sanitaire comme avec la crise énergétique liée à la guerre en Ukraine ?

LD : Tout comme les effets des sanctions sur la Russie ont été exagérés, de la même manière, leurs effets sur l'économie européenne ont été exagérés dans le cadre d'une exploitation politique, notamment sur les questions gazières, de pétrole, d'électricité et de blé. 

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Ce n'est pas vrai que l'Europe va entrer en crise catastrophique: le rationnement de l'électricité et du gaz sont possibles. Nous avons déjà connu cela en 1973, au moment de la crise pétrolière des États arabes du Golfe, et à nous avons su affronter ce défi. Déjà, nous prônions un retour à certains comportements sobres du passé: on se souvient du pape Paul VI qui se rendit à Piazza di Spagna, pour une cérémonie, en utilisant la calèche au lieu de la voiture... Sans aller jusque-là, l'Europe doit renoncer à une partie de ses luxes, privilèges et commodités si elle ne veut pas renoncer à sa liberté et à sa démocratie dans l'avenir. Des contraintes seront nécessaires, mais cela ne veut pas dire une catastrophe générale. 

De plus, il y a aussi des mouvements neo-autoritaires en Europe, comme Orban en Hongrie, et pas seulement l'expansionnisme russe. L'effondrement du système occidental et de la mondialisation qu'il a créée apparaît lointain et irréaliste, tel que prôné dès 2001 par les mouvements No Global, puis endossé aujourd'hui par Vladimir Poutine, ce qui fait écho à la lutte de Tito et des pays "Non-alignés" contre le Capitalisme occidental. Certes, Poutine n'est pas Staline, militairement, mais il n'est pas Karl Marx non plus, idéologiquement.

La crise et la fin de la classe moyenne occidentale sont évidentes, tant en Europe qu'en en Amérique, mais c'est une tendance déjà en cours, qui verra les riches s'enrichir - pensez aux marchands d'armes ou de céréales, ou de ressources énergétiques - et les masses se prolétariser progressivement encore plus, alors qu'elles avaient été habituées au bien-être depuis là les années 1900. Qu'il s'agisse d'un risque de guerre, de "second Moyen Âge", provoqué par la montée des fondamentalismes religieux ou des millénarismes, souvent véhiculés par les guerres, ou des conséquences du Covid non terminé, de la famine et la paupérisation de masse, le résultat finit par être identique...

Le vrai problème est que - on l'a vu à la Renaissance et dans les années 1800 - la démocratie, la liberté et le bien-être de masse sont étroitement liés... Et quand l'un manque, l'autre manque aussi... En tout cas, on va vers une Eurasie riche, une Europe en crise et « pauvre », avec ou sans invasions plus ou moins barbares... L'histoire ne s'arrête pas aux portes de l'Europe.

ADV : Et qu'en est-il du volet militaire des moyens de l'OTAN et de la guerre de succession à Moscou ?

LD : Jusqu'à présent, les États-Unis ont déjà vendu plus d'un tiers de leur stock de missiles antichars Javelin à l'Ukraine, et il faut trois à quatre ans pour reconstituer ces réserves. Il en va de même pour des missiles sol-air Stinger, a fortiori, comme en témoignent les récents pourparlers du Pentagone avec les principaux fabricants d'armes américains. De plus, le Congrès américain, a plus d'une fois demandé au fil des ans une augmentation des dépenses militaires. Et déjà, depuis 2018, un rapport de la Commission de défense du Congrès a souligné que les États-Unis risquaient de perdre la guerre dans un scénario de confrontation directe avec la Russie et la Chine...

En cas d'alliance Iran-Chine-Russie-Corée du Nord, un rapport de 12 experts militaires présenté à Trump en 2018 avertissait que les États-Unis (donc l'OTAN) pourraient perdre une ou plusieurs guerres contre ce bloc... Les États-Unis pourraient être vaincus s'ils devaient se battre sur plusieurs fronts à la fois. Pendant la Seconde Guerre mondiale, en revanche, l'alliance pré-OTAN entre les États-Unis, l'Angleterre, l'Australie et d'autres nations s'est avérée efficace sur deux théâtres de guerre, en Europe et dans le Pacifique, mais le Japon n'était pas la Chine d'aujourd'hui, et l'Allemagne n'était pas la Russie... Et le troisième élément initial, l'Italie, n'avait militairement pas la force de l'actuel Iran et de la Corée. Aujourd'hui, les Américains, habitués depuis trente ans à combattre le terrorisme ou à livrer des guerres néo-coloniales mineures ou à gérer leur empire, ne savent plus gagner une guerre mondiale conventionnelle et pas plus qu'avec l'utilisation d'armes nucléaires tactiques, alors qu'ils ont été les premiers au monde à utiliser l'arme atomique en 1945, au Japon.

Idem pour l'OTAN, en crise stratégique évidente, si engagée dans des conflits sur plus d'un scénario. L'Europe n'a pas été suffisamment protégée depuis longtemps: il suffit de regarder la modestie des défenses sur la Baltique et sur le versant oriental de l'alliance , malgré les récents renforts. Sans parler du côté sud, exposé aux Russes en Syrie et en Libye dans une Méditerranée devenue Mer des Russes et non plus une Mare Nostrum. Tout cela malgré la bonne volonté des Européens qui n'ont que virtuellement une armée européenne, laquelle n'existe toujours pas. Ceci malgré l'avantage technologique - pour l'OTAN et l'Amérique - de l'avion à méthode Stealth, dont la première version, la meilleure, est aujourd'hui hors d'usage, sauf pour l'entraînement. Aujourd'hui, avec la technologie Stealth, les éléments suivants restent utilisés : 

-Le Northorp Grunman B2 Spirit et le B21 Raider.

-Le Loockheed Boeing F22 Raptor.

-Le Loockeed Martin F35 Lightning.

Mais maintenant, les Russes et les Chinois utilisent également la technologie de type Stealth, notamment pour les avions Sukhoi PAK FA et PAK FA T50., aujourd'hui classé comme Sukhoi SU57, utilisé dans la guerre en Ukraine, et supérieur au Stealth américain de première mode.

Les avions russes ont également une version exportée vers les alliés, le SSU57E. La technologie de type furtive est ensuite présente sur les avions russes :

-Sukhoi HAL FGFA,

- les projets Mikoyan PAK DP et Tupolev PAK DA

 - les avions chinois Shenyang J-XX.

Il faut ajouter que les avions militaires américains les plus récents, contrairement aux avions européens et français, parfois maltraités, se sont souvent révélés médiocres et avec des défauts techniques évidents : les limites des F35 et F22 sont connues.

En effet, les Eurofighters et les avions français, même s'ils datent de plus de trente ans, sont toujours plus efficaces, en confrontation directe avec les Russes : c'est arrivé récemment avec les intercepteurs italiens de l'OTAN, à la frontière entre la Pologne et la Russie. .

La sixième génération d'avions de supériorité stratégique occidentaux, à l'exception des avions britanniques et européens, s'avère dès lors insuffisante.

Il faut donc aller au-delà des avions furtifs et supersoniques, vers la septième génération.

En revanche, la production du F35, vainqueur à l'époque de la compétition Joint Strike Flyer, un avion Lookheed, "a pressurisé le gouvernement américain jusqu'au dernier centime", se sont plaints certains officiers supérieurs américains, dont Christoph Bogdan, Lieutenant General USAF, (en 2013). Le profit l'emporte souvent sur la qualité : on se rappelle le cas du scandale de corruption Lookheed en Italie, dans les années 70, et le débat qui a duré des années, en Italie, dans la dernière décennie, sur l'achat du nouveau F35). Les Fiasco du F 35 ont été surnommés les successeurs médiocres des premiers Stealth américains.

Selon la Rand Corporation, qui collabore avec l'US Defense, le F35 est peu Fighter, c'est-à-dire qu'il n'est pas capable de rivaliser avec le Sukhoi SU35 russe, au combat, sans parler du SU57 : il est inférieur en accélération, montée et tournée, et avec des défauts dans la commande électronique instrumentale. Le F35 atteint par exemple une accélération à 6G, tandis que les Eurofighters et les Rafale à 8G. De plus, le F35 ne dispose que de deux armes de supériorité aérienne, et l'autonomie de vol est médiocre. Bref, des avions conçus pour ne pas faire la guerre...Quoi qu'il en soit, il existe des données objectives qui font la différence, même dans le conflit par mer et par terre. 

ADV : Quid d'une "frappe" américaine ou de l’OTAN sur la flotte russe pour répliquer à l’usage d’une arme nucléaire sur le sol ukrainien comme cela a été évoqué par des responsables américains et occidentaux?  

LD : Une éventuelle frappe préventive conventionnelle sur les navires russes de la mer Noire ou de la mer Baltique, en cas d'attaque nucléaire tactique russe contre l'Ukraine, serait le Pearl Harbor du XXIe siècle, mais du côté russe... Et les sous-marins nucléaires russes, "interpellés" dans cette situation, ont aujourd'hui le rôle de meneurs de jeu dans ce jeu à somme nulle entre l'OTAN et la Russie... Le K329 Belgorod,  la nouvelle arme du général de l’Armée Russe en Ukraine, Surovikin, peut être "l'Armageddon" russe auquel Biden a fait allusion ces derniers mois : est une classe Oscar :un sous-marin conçu depuis le 24 juillet 1992, lancé le 23 avril 2019 et actif à partir du 28 avril 2022, avec huit Poséidons à bord, capables de créer un tsunami radioactif...

Une arme que l'OTAN et les États-Unis ne possèdent pas, en fait l'arme russe la plus dangereuse avec les missiles balistiques multi-têtes nucléaires Zirkon et les Kinzhal ultrasoniques. Le Belgograd, est conçu par Rubin Center Design, de Saint-Pétersbourg, du groupe JSC, United Shipbuilding Corporation, de Moscou. Il est intéressant de noter que, déjà en 2012, le sous-marin supérieur de la marine russe (et le premier sous-marin nucléaire post-soviétique, le Volgograd de 1993 étant resté inachevé), était destiné à une "opération spéciale" (pour des tâches "spéciales"), peut-être parce que l'occupation de l'Ukraine et la confrontation militaire avec l'Occident et l'OTAN étaient déjà prévues à l'époque, avant 2014 et quatre ans après le sommet décisif de l'OTAN sur l'Ukraine en 2008....

Enfin, à propos des opérations militaires des armées, un chiffre significatif : les militaires américains en Europe ne sont aujourd'hui sur le terrain que 75 000, contre 400 000 et plus jusqu'en 1989/91. Portée à cent mille unités Groupe allié des Etats-Unis, l'Otan ne compte que 40 000 hommes dans les forces d'intervention rapide, contre presque un million de Russes (420.000 avec les conscrits  officiellement) enrôlés et entraînés et un potentiel de 25 millions de Russes  pouvant être enrôlés en cas de mobilisation générale...

Les Chinois et les Coréens, à leur tour, déploient une vaste armée : les Chinois avec trois millions d'unités, parmi deux millions d'actifs, plus des réservistes et des paramilitaires, et ont une capacité de mobilisation presque illimitée, compte tenu de leur population. Le Choson immin gun de Corée peut disposer de 1 200 000 actifs et 600 000 réservistes.

Enfin, l'Iran compte 575 000 actifs et 350 000 réservistes. Ensuite, il y a les forces de la Communauté des États indépendants de la CEI et des pays d'Asie centrale alliés des Russes, puis d'autres pays alliés des Russes dans le monde : Venezuela, Somalie, Cuba... et ceux d'Asie et l'Afrique, prête à s'engager, avec les Russes et les Chinois comme force motrice.

Et même si les USA comptent deux millions de soldats en activité dans le monde, ce n'est que récemment que l'Otan avec Stoltenberg, en juin, a décidé (et dans quel délai ?) de porter à 300 000 les militaires déployés puis de transformer les battlegroups en brigades de combats, déjà : des brigades aux divisions et armées Autre problème tactique et stratégique, l'Otan veut aussi transformer en une vrai armée "l'OTAN Response Force" d'aujourd'hui, peut-être plus agile et flexible que les géants orientaux, sachant tout de même que les Russes disposent d'un allié de l'ombre - selon sa convenance- comme l'Inde, ainsi que de la carte à jouer qu'est la Turquie ambivalente... 

Militairement, au-delà de la rhétorique occidentale, il est clair que dans la pratique, trop peu et trop tard a été fait jusqu'à présent pour renforcer l'Europe : on a trop misé sur le rôle gagnant de l'Ukraine, mais on oublie que même les vrais cosaques, en 1600, n'ont pas pu se libérer de l'empire russe naissant... Dès lors, même si les militaires américains et de l'OTAN, la coalition occidentale, seraient en infériorité numérique, technologique, face aux nouvelles superarmes russes, paradoxalement, le bouclier antimissile (ou ex-« guerre des étoiles » de Ronald Reagan), remis aujourd'hui en usage expérimental, est de retour dans l'actualité avec les canons et faisceaux laser des satellites et de l'espace orbital de la planète.

Et ce n'est pas un hasard si l'aviation russe s'appelle déjà Aerospace Defense... Alors en cas de guerre réelle et directe entre l'Otan et "l'Alliance orientale" dirigée par la Russie, il serait déjà urgent de mobiliser en Europe les réservistes et de les former avec une mobilisation partielle avant que les la brèche des possibles dissensions inter-européennes devienne une avalanche... 

Quant aux jeux de cour sur la succession possible au Kremlin, il se résout aujourd'hui à un jeu de 4 entre Patroushev, le dauphin désigné (et généralement en Russie le dauphin gagne); Surovikin, Medvedev, Mishustin, qui a déjà constitutionnellement la charge de remplacer Poutine en cas de vacance du pouvoir.

Le nouveau tsar de Saint-Pétersbourg, Poutine, vient d'achever le tournant des 70 ans, or c'est l'âge du déclin ou du remplacement des dirigeants, avant les soviétiques puis Les Russes. Patroushev apparaît comme un nouvel Andropov, mais en définitive, ce ne seront que les pouvoirs forts, les mêmes qui entourent encore Poutine, comme le patriarche Kirill, l'Armée de Guerasimov, les oligarques/soloviki de Gazprom et certains milliardaires suisses russes qui fréquentent Davos et à qui Poutine lui-même doit le pouvoir, de décider du successeur du dernier tsar post-soviétique.

Pourtant, combien de temps et d'histoire se sont écoulés depuis cette année 1952, alors que Staline régnait et que naissait Poutine, ce dernier aspirant à une plus grande longévité encore que Staline, en dépassant peut-être ses 29 ans de règne républicain soviétique.

ADV : Enfin, que va-t-il donc se passer entre Taïwan et la Chine ?

LD : On risque de passer des deux Chines antagonistes à une Chine unique et centralisée, pensez à la reprise de Hong Kong. Cette fois, Xi pourrait faire un geste surprise, non pas un blocus naval, qui à son tour serait encerclé par des navires américains, mais une action sur le modèle de celle russe de 2014 en Crimée, avec des parachutistes, des troupes et des navires sans drapeau chinois, donc formellement pas en confrontation directe avec l'Amérique et l'OTAN et l'alliance régionale occidentalo-asiatique Quad, usant ainsi d'une ruse typiquement orientale pour minimiser les conséquences de l'invasion de Taipei.

Il est clair que le dirigeant chinois a la possibilité, après sa confirmation au Congrès national de son statut renouvelé de président, pour agir militairement à Taïwan. Un coup de force de quelques heures effectué par surprise et non une longue guerre comme en Ukraine semble possible. Et la Chine a le potentiel militaire pour faire une blitzkrieg à Taïwan. [La plupart des experts militaires occidentaux considèrent qu’une opération par voie navale est complexe et beaucoup moins facile à maîtriser qu’une invasion terrestre, NDLR]  

ADV : Concernant l'affaire du missile "russe" qui s'est écrasé en territoire polonais, dont Zelenski continue de dire qu'il est russe  et non un anti-missile S 300 ukrainien comme l'ont reconnu les Polonais eux-mêmes et l'OTAN, donc les EU, qu'en pensez-vous ?

LD : La contradiction dans la version américaine semble évidente: le chef de la CIA était présent à Kiev et les Américains ont dit qu'un missile de Kiev avait touché la Pologne. Le même jour, les Renseignements américains ont affirmé qu'il s'agissait d'un missile russe, et avec eux CNN, pour ensuite mystérieusement inverser leur version, après une pause pour "effectuer des vérifications sur le terrain", afin de s'accorder avec la Pologne et les alliés de l'OTAN sur la façon de réagir.

Que se passerait-il si un missile russe s'abattait au-dessus de la Pologne de façon non accidentelle, depuis avion stratégique russe ou d'un lancement d'une base en Biélorussie ? Des décisions à prendre en quelques minutes, y compris par la France, ne sont pas possibles aujourd'hui avec les procédures bureaucratiques des articles 4 et 5 de l'OTAN. Ceci est le problème, et cela concerne toute l'Europe ainsi que les Etats-Unis...

Pour retrouver la première partie de l'entretien d'Alexandre del Valle et de Leonardo Dini : cliquez ICI

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